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Lorfing, Accaoui, La renégociation des contrats internationaux, 2011, pp. 80 et seq., 153 et seq.

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Lorfing, Accaoui, La renégociation des contrats internationaux, 2011, pp. 80 et seq., 153 et seq.
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D. - La renégociation du contrat par les parties


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La renégociation du contrat est une obligation à la charge des parties dans le cadre d'une situation de hardship, dès lors que ses conditions de mise en œuvre sont réunies. Dans le cadre d'une situation de force majeure, l'obligation de renégociation du contrat n'est rendue obligatoire que pour autant que les parties l'aient expressément prévue au sein d'une clause contractuelle, soit en raison du caractère temporaire de l'impossibilité d'exécution du contrat. Ni les législations nationales, relatives à la force majeure, ni les instruments juridiques internationaux, ni la jurisprudence arbitrale ne prévoient, ni ne mettent à la charge des parties une quelconque obligation de renégocier le contrat. En effet, les Principes UNIDROIT (art. 7.1.7) et les Principes du droit européen des contrats (art. 8 : 108) ne prévoient pas la renégociation possible du contrat pendant sa suspension temporaire, ou en cas de persistance de l'impossibilité d'exécution. Cette possibilité de renégociation pendant l'empêchement temporaire de l'exécution du contrat n'est pas non plus envisagée par la clause CCI relative à la Force Majeure (2003) ou par celles CCI relatives à certains contrats modèles internationaux (contrat modèle de vente internationale publique ; contrat modèle de franchise internationale de distribution ; contrat modèle d'approvisionnement clés en mains d'ensembles industriels). En revanche, les parties peuvent envisager la renégociation du contrat à condition que leur volonté soit clairement exprimée.
Enfin la distinction des hypothèses se mesure à l'intervention de l'arbitre dans le contrat.  


E. – L’intervention de l’arbitre de l’arbitre dans le contrat


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L’intervention de l’arbitre dans le contrat pour l’adapter ou y mettre fin n’est envisagée que dans le cadre du hardship. En effet, l’article 6.2.2. 4) des principes UNIDROIT précise que «  Le tribunal qui conclut à l’existence d’un cas de hardship peut, s’il l’estime raisonnable, soit a) mettre fin au contrat à la date et aux conditions qu’il fixe, soit, b) adapter le contrat en vue de rétablir l’équilibre des prestations. » De même, les PDEC précisent à l’article 6 :111 3) a) et b) cette intervention. En effet, lorsque l’arbitre intervient dans une situation relevant de la force majeure, c’est pour vérifier la réunion des conditions de la force majeure et le comportement des parties.
La modification des conditions d’exécution du contrat ont permis de préciser les conditions relatives à l’événement à l’origine du hardship ainsi qu’à la nécessaire distinction des hypothèses de hardship et de force majeure quant à l’incidence de l’événement sur l’équilibre du contrat.

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L’analyse de la jurisprudence civile récente appelle les conclusions suivantes :
L’évolution favorable à la théorie de l’imprévision qui semblait se dessiner dans la jurisprudence civile antérieure marque un coup d’arrêt. Les juges avaient pourtant précisé les conditions du hardship : l’obligation de renégocier le contrat, l’exigence de l’échange des propositions conformément à la bonne foi dans l’exécution du contrat, la responsabilité contractuelle en cas d’abus suite au désaccord des parties, et enfin l’intervention du juge non pas pour modifier le contrat mais pour interpréter la volonté des parties telle qu’exprimée dans le contrat, pouvant même mener à l’invitation faite aux parties de tenter une ultime renégociation.
Par ailleurs, la Cour établit le lien entre l’obligation de loyauté et d’exécution de bonne foi et la renégociation du contrat.625
Au nom de la bonne foi dans l’exécution du contrat, elle met à la charge de parties l’obligation d’agir concrètement en collaboration avec le cocontractant en difficulté d’exécution : prendre des mesures concrètes (Chevassus 1998), ne pas faire des propositions abusives au cours de l’échange des propositions (2007). En somme, « elle exige des initiatives, des ‘mesures concrètes’ (…) qui permettent au partenaire en difficulté de conserver le bénéfice même d’un contrat pour lui essentiel, quitte d’ailleurs à ce que celles-ci s’expriment par une révision de la loi contractuelle initiale »626.

La jurisprudence met enfin en lumière le lien entre l’obligation de renégociation et celle de modérer le dommage, la deuxième éclairant la première en justifiant son existence par le dommage résultant de la rupture du lien contractuel en raison de la ruine du débiteur ou de l’impossibilité d’exécution du contrat sans qu’une solution n’ait été recherchée. La renégociation du contrat constituant ainsi une limitation du dommage antérieurement à la rupture du contrat et dans le souci de l’éviter.

Cette réticence à l’égard de la théorie de l’imprévision et de son corollaire la renégociation du contrat se reflète dans les trois projets de réforme du droit des obligations.

625V.J. MESTRE, « Il ne faut pas confondre ‘déséquilibre structurel’ et ‘modification imprévue des circonstances économiques’ », RTD civ. 2004/2, pp. 290-291, « Derrière cette réponse au pourvoi, on est naturellement renté de voir un indice de la position que pourrait prendre un jour la première chambre civile si elle était confrontée à l’équation bonne foi / renégociation. En effet, ce n’est pas lui faire injure que de penser qu’elle est trop fine de connaisseuse du droit des contrats pour avoir employé ces termes à la légère » spéc. p. 291. V. Contra O. Renard-Payen, note sous Cass. 1 ère civ., 16 mars 2004, JCP E, n°20-21, pp. 817-818 pour qui les décisions jurisprudentielles qui y sont relatives sont rares et ponctuelles.
626V.J. MESTRE, « Où le devoir de loyauté fait naître pour l’un des contractants le droit de rester concurrentiel » RTD civ. 1999/1, pp. 98-99.

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