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Rabello, Alfredo Mordechai, La Théorie de la "Culpa in Contrahendo" et la Loi Isreaélienne sur les Contrats 1973, R.I.D.C.1997, at 37-73

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Rabello, Alfredo Mordechai, La Théorie de la "Culpa in Contrahendo" et la Loi Isreaélienne sur les Contrats 1973, R.I.D.C.1997, at 37-73
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LA THEORIE DE LA « CULPA IN CONTRAHENDO » ET LA LOI ISRAÉLIENNE SUR LES CONTRATS 1973*

Alfredo Mordechai RABELLO**

Plus de vingt ans ont passé depuis que la Knesset (le Parlement israélien) a adopté la nouvelle loi sur les contrats (1973-5733), basée sur les principes de droit de l'Europe continentale. Entre autres innovations, l'article 12 de la loi fixe l'obligation aux parties de négocier de bonne foi. L'auteur examine comment la doctrine et la jurisprudence israéliennes ont réagi à l'élimination du principe caveat emptor, résultant de cet article. Il traite ensuite des problèmes théoriques posés par les chercheurs et il décrit quelques cas de mauvaise foi trouvés dans la jurisprudence. L'auteur conclut que les conséquences pratiques du changement sont semblables à ce qui aurait pu arriver en Europe. Il suggère aussi que l'expérience israélienne présentera un intérêt particulier pour les juristes européens qui essayent de trouver des méthodes pour accomplir une harmonisation entre les principes juridiques anglais et continentaux.

More than 20 years have passed since the Knesset (Israel's Parliament) adopted a new contract law (1973-5733), based upon continental European principles. Among other innovations, section 12 of the law prescribed the obligation of parties to negociate in good faith. The author examines how Israeli scholarship and case law have reacted to the disgarding of the precedent of principle of caveat emptor, as expressed by enactment of the section. The article addresses a number of the theoretical problems discussed in the scholarship and reviews some practical cases of bad faith treated

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in case law. The author concludes that the practical consequences of the change in the law are very similar to that which could have been expected in Europe. He also suggests that Israeli experience will be of special interest for European jurists searching for ways to effect harmonization between English and continental European legal principles.

A. - introduction1

Il y a plus de trente ans que la Knesset a entrepris un projet de codification du droit civil israélien par l'adoption de la loi sur la capacité juridique et la tutelle, 5722-19622.

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La codification a entraîné des changements majeurs tant dans ce qui a rapport à l'approche utilisée pour l'étude de la loi que dans sa mise en application. Dorénavant, il a fallu s'habituer à mettre beaucoup plus d'emphase tant sur l'étude du texte législatif que sur les commentaires offerts par la doctrine. De plus, en formant ses opinions le juriste israélien devait moins s'appuyer sur les précédents judiciaires3.

En général, les Facultés de droit furent en mesure d'introduire une nouvelle méthode de pensée et d'étude dans le domaine du droit des contrats. Chose certaine, la tâche ne fut pas facile à accomplir, d'autant plus qu'il existe une véritable pénurie, tant en anglais qu'en hébreu, de littérature juridique portant sur les systèmes de droit continental. Cela dit, 40 l' « establishment » juridique parvint à enseigner et à rendre intelligible, tant pour les étudiants que pour l'ensemble des juristes israéliens, une approche juridique on ne peut plus différente et étrangère à l'approche de la common law britannique. On était conscients du fait que cette tentative comportait énormément de risques, notamment, en créant un mélange de droit continental assorti d'une méthodologie anglo-saxonne4. Aussi, fallait-il s'abstenir d'adopter par inadvertance des principes plus généraux du droit continental général, et en particulier du droit allemand. Le droit comparé ne devait que servir d'outil, afin de mettre en place une solution fondée spécifiquement sur le droit israélien. Il appartenait aux juristes d'examiner de près le texte législatif, afin de voir si l'intention du législateur n'était pas plutôt d'adopter une voie indépendante, visant de préférence à reconnaître les contributions et les solutions offertes par le droit juif traditionnel5.

Au départ, un certain degré de réticence et de suspicion se manifestait devant ce nouveau phénomène qu'était la « codification ». Même parmi les plus « Continentaux », était présente la crainte que soit instaurée un 41 régime légal codifié, dépourvu de substratum, d'une tradition et de doctrine, rédigées soit en hébreu, soit en anglais. Au cours des premières années, l'intégration du droit civil à la Common Law, a pris l'allure d'une tâche impossible. Les deux régimes furent perçus comme ressortissants de deux ordres distincts, destinés à ne jamais entrer en dialogue l'un avec l'autre. Les juges éprouvèrent naturellement de l'inquiétude devant l'éventualité qu'ils soient dépouillés du statut honorable dont ils étaient dotés sous le régime de la Common Law. Les avocats, déjà familiers avec l'ancien système, partagèrent également le manque d'enthousiasme des membres de l'appareil judiciaire, en raison du travail considérable de réadaptation et de réajustement qu'imposait forcément un projet de codification d'une telle envergure. Même dans les Facultés de droit, certains manquaient des outils nécessaires pour aborder la nouvelle codification. Cependant, les paroles suivantes du Pr Guido Gad Tedeschi servirent d'inspiration : Ce n'est pas en vain que les nations en besoin de lois étrangères se tournèrent vers les régimes de droit continental, y compris celles affiliées à l'Amérique ou au Royaume-Uni. De même, ce n'est pas en vain que les juristes de Common Law réussirent à fournir des justifications pour cette entreprise ».

« Le dogme, à la base de la tradition romaine-continental, caractérisé par une tendance à la "systématisation" complexe, facilite énormément le travail de codification, qui, sans aucun doute, serait difficile à accomplir à partir d'un autre ensemble de principes dogmatiques ».

« D'une manière remarquable, le fait que cet ensemble spécifique de principes dogmatiques soit commun à de nombreux régimes juridiques, ancrés tant dans le passé que dans le présent, nourris de nombreuses idéologies dissemblables, vient contrecarrer le danger qu'en conséquence de son absorption, le législateur israélien ne se voit contraindre par la suite dans ses efforts pour former un régime juridique différent, voire indépendant. Ainsi, dans la mesure où il voudrait s'inspirer de certaines règles fondatrices de la tradition continentale, l'adoption de ces dernières ne sera pas interprétée comme une recommandation de sa part à se référer à un régime juridique étranger en particulier »6.

A l'heure actuelle, tout le monde est parvenu, d'une façon ou d'une autre, à s'adapter au « nouveau » système. Il se peut fort bien que le processus parcouru lors de la codification israélienne serve de modèle aux juristes européens dans leurs démarches en vue de créer un régime de droit privé pan-européen, capable tant de mettre en accord les divers systèmes de droit continentaux que d'harmoniser ces derniers avec la Common Law. En effet, les juristes israéliens osent croire que leur expérience avec les difficultés entourant la mise en application du principe de la « bonne foi » en tant que règle de conduite tant dans les stades 42 précontractuels que suite à la formation du contrat7 sera d'un grand intérêt pour les juristes européens.

B. - L'Article 12 de la loi sur les contrats (partie générale), 5733-1973

L'introduction aux notes explicatives qui accompagnaient le projet de loi (1970), énonçait que, « Le [premier] chapitre [du projet de loi] prend fin avec la règle obligeant les parties de mener leurs négociations, tant pendant les phases de la formation qu'à la conclusion du contrat, de bonne foi et de façon conforme à l'usage »8. Cette disposition incorpore dans le droit des contrats israélien la doctrine traditionnellement rattachée au droit continental de la culpa in contrahendo. L'origine de cette disposition repose essentiellement sur l'idée que des négociations doivent être conduites de façon conforme à l'équité, un principe qui se trouve par ailleurs ancré dans la tradition judaïque : « Tes déclarations seront justes, ainsi que tes refus » , « Il ne faut pas dire une chose par la bouche et une autre dans le cœur », (Talmud, Baba Metzia 49 a). En effet, l'article 12 de la loi israélienne sur les contrats prescrits : « (a) En négociant un contrat, une personne agira de bonne foi et de façon conforme à l'usage. (b) Une partie qui n'agit pas de bonne foi et de façon conforme à l'usage sera passible de verser à l'autre partie une compensation pour le dommage causé en raison des négociations. La préparation du contrat et les articles 10, 13 et 14 de la loi sur les contrats (recours pour violation de contrat), 5731-1970, recevront application mutatis mutandis »9. « En négociant un 43 contrat » : c'est-à-dire, au stade précontractuel, les parties n'ont pas encore abouti à un accord, soit à la formation du contrat.

Il est possible de faire le rapprochement entre cette dernière disposition et le premier volet de l'article 1337 du Code civil italien : Négociations et responsabilité précontractuelle.

« Les parties agiront de bonne foi tant lors des négociations qu'à la formation du contrat (1338, 1366, 1375, 1460) ».

La loi israélienne, cependant, complique quelque peu les choses en imposant une obligation double : « De bonne foi et de façon conforme à l'usage ».

C. - « De bonne foi et de façon conforme à l'usage »

Nous tenterons d'élucider le sens de l'expression « De bonne foi et de façon conforme à l'usage ». Au préalable, toutefois, s'impose un survol des diverses instances où cette formule apparaît tant dans le droit israélien que dans le droit continental.

L'expression « De façon conforme à l'usage » (en hébreu : Bederech Mekubelet) se trouvait déjà, sans être accompagnée cependant du critère de la bonne foi (en hébreu : tom lev), dans la loi sur les gages, 5727-1967, à l'article 19 (a), qui prévoit : « Un gage, tel qu'il est fait référence à l'article 17 (3), sera réalisé de façon conforme à l'usage du marché... »10

De la même façon, la formule « de bonne foi » apparaît isolée dans le cadre de l'article 91 du décret sur les lettres de change (nouvelle version) : « Tout acte posé avec honnêteté sera considéré de bonne foi - quant au sens prêté à cette dernière expression dans le cadre du présent décret - qu'il ait été fait avec négligence ou non »11.

A ce sujet, il a été dit que « la bonne foi constitue un critère subjectif. En effet, une partie qui reçoit une lettre de change ignorant que l'endossement est contrefait en fait l'acquisition de bonne foi [...] la bonne foi est une question relative à l'état d'esprit »12.

On retrouve également la notion de bonne foi comme critère subjectif dans l'article 34 de la loi sur la vente, 5728-1968 qui a introduit le principe de « Market Overt » dans le droit israélien13 : « Lorsqu'un bien meuble est vendu par un commerçant trafiquant en semblables matières, et que la vente se fait dans le cours des activités de l'entreprise, le droit 44 de propriété se voit transféré à l'acheteur libre de toute charge, séquestre ou tout autre droit sur le bien vendu même si le vendeur n'en est pas le propriétaire ou n'est pas chargé ni autorisé à le vendre, pour autant que l'acheteur en ait pris possession et soit de bonne foi »14.

Quel sens faudrait-il donner dans ce cas à l'expression « de bonne foi ? » Y-a-t-il lieu d'adopter la position anglaise15, exigeant du vendeur qu'il agisse équitablement ou serait-il préférable d'adopter plutôt une interprétation semblable à celle offerte par le droit allemand ? Le BGB, à l'article 932 (b), prévoit : « L'acquéreur n'est pas de bonne foi s'il est conscient, ou si suite à une négligence grossière, il n'est pas conscient, que le bien n'appartient pas à celui qui en a la disposition » « Der Erwerber ist nicht in gutem Glauben, wenn ihm bekannt oder infolge grober Fahrlässigkeit unbekannt ist, das die Sache nicht dem Veräußerer gehört »16.

Von Tuhr17 faisait la distinction entre l'expression guter Glaube et la notion romaine, de portée plus générale, de bona fides. Bona fides constituait principalement une notion morale, faisant référence à la conduite d'un homme droit. D'après Von Tuhr, cette notion engendra d'un côté, le Treu und Glaube, un principe d'interprétation afin de supplémenter la transaction légale et de l'autre le guter Glaube. Le caractère particulier du guter Glaube ne réside plus dans la notion d'intégrité mais plutôt dans la connaissance ou l'ignorance de certains éléments. Le guter Glaube forme alors le cadre moral à partir duquel une partie sera jugée responsable. Elle ne se verra attribuer la responsabilité que pour ce qui se rapporte aux circonstances et aux actions dont elle aura pris connaissance.

L'influence exercée par le droit romain sur le droit allemand est évidente : D.50.16.213.2, Ulpianus libro primo regularum, ... « Lata culpa » est nimia neglegentia, id est non intellegere quod omnes intellegunt. (Règles de Ulpian, livre 1, ... « Lata Culpa » est la négligence 45 grossière, c'est-à-dire ne pas réaliser ce que tout le monde réalise)18. D.50.16.226, Paulus, libro primo manualium, Magna neglegentia culpa est ; magna culpa dolus est. (Paul, livre 1, La négligence grossière constitue une faute ; une faute grossière constitue du dol)19.

A partir de l'article 34 de la loi israélienne sur la vente (1968), il n'y a pas raison de croire que l'acheteur ayant négligé une obligation sera automatiquement vu comme ayant manqué à son devoir d'agir de bonne foi. Il importe de noter que cette loi fut la première à être examinée par les tribunaux israéliens et la doctrine, tant en raison de son caractère codificateur, que sa date d'entrée en vigueur : 1968, c'est-à-dire cinq ans avant l'adoption de la loi sur les contrats. Cependant, il semble que même dans le droit israélien, le principe du « market overt » sera prévalent dans le cas où l'ignorance de l'acheteur découle d'une négligence grossière de sa part20.

Jusque là nous avons survolé les diverses lois israéliennes comprenant les expressions « de façon conforme à l'usage » et de « bonne foi ». Ces expressions apparaissent également, adjacentes l'une à l'autre, dans un même bloc, dans la loi sur la vente de 1968, à l'article 6, qui prévoit : « Tout droit ou obligation provenant d'un contrat de vente sera exercé ou exécuté de bonne foi et de façon conforme à l'usage »21. De la même manière, l'article 4 de la loi sur le location et le prêt de 1971 prévoit : 46 « Tout droit ou obligation provenant d'un contrat de location sera exercé ou exécuté de bonne foi et de façon conforme à l'usage ».

Finalement, la loi sur les contrats (partie générale), à l'article 39, fonde le principe d'après lequel un contrat doit être exécuté de bonne foi et de façon conforme à l'usage : « Tout droit ou obligation provenant d'un contrat sera exercé ou exécuté de bonne foi et de façon conforme à l'usage ». Cette disposition a subi l'influence du droit continental ; l'article 242 du BGB se fit : « Le débiteur est tenu d'exécuter [le contrat] selon l'exigence de la bonne foi, en considérant l'usage commun ». « Der Schulder ist verpflichtet, die Leistung so zu bewirken, wie Treu und Glauben mit Rücksicht auf die Verkehrssitte es erfordern »22.

Le Code civil français, quant à lui, à l'article 1134 (a), énonce la règle qui suit : « Les conventions... doivent exécutées de bonne foi »23. De la même façon, l'article 1375 du Code civil italien dispose : « Il contratto deve essere eseguito secondo buona fede »24.

Les auteurs, dans leurs études sur la notion de « bonne foi », ont traité de long en large des rapports existants entre le devoir d'agir de bonne foi et le devoir d'agir avec intégrité et de façon équitable : S'agit-il essentiellement de la même obligation ou avons-nous à faire à deux obligations distinctes ?

Nous nous limiterons ici à citer les dispositions législatives pertinentes ainsi qu'à renvoyer le lecteur à la doctrine sur le sujet. Il faut particulièrement prêter attention au fait que l'article 12 de la loi sur les contrats (partie générale), 5733-1973 ne s'applique qu'à une étape bien précise, voire, séparée de la relation contractuelle. En effet, il faut dire que toutes les dispositions législatives mentionnées ci-dessus, ne s'appliquent qu'à partir de la formation du contrat, c'est-à-dire après qu'un lien contractuel lie les parties. Cependant, l'article 12 ne vise que les stades précontractuels, in contrahendo, en dépit, du fait qu'il soit tout à fait possible, qu'une absence de bonne foi, ou les conséquences qui en découlent, ne soit découverte qu'ultérieurement à la formation du contrat.

Gabriela Shalev, fut parmi les premières à tenter une interprétation de l'article 12 de la loi sur les contrats. Son étude sur les clauses de non-responsabilité a été rédigée lors d'une période où le droit contractuel israélien se trouvait dans un état « crépusculaire » (durant sa période 47 transitoire, passant d'un régime basé sur le droit anglais à un régime calqué sur le modèle continental). Ses propos méritent d'être cités intégralement25 : « Nous ne pouvons nous mettre à la tâche d'élucider le sens de la notion de « bonne foi » sans rappeler au préalable le lien étroit que maintient cette dernière avec la notion « de façon conforme à l'usage »26. Afin de se conformer au devoir d'agir de bonne foi - tant à l'étape de la formation du contrat que dans les stades préparatoires - il faut également se comporter de façon conforme à l'usage27. Il s'agit ici d'un modèle de comportement qui ressort de l'idéal et l'obligation de s'y conformer est sans aucun doute porteuse de connotations morales. L'élucidation de cette dernière résidera entre les mains de l'appareil judiciaire et devra être conditionnée tant par des idéologies économiques et sociales que par les faits qui se présentent dans le cas d'espèce. Ici nous devrons nous limiter à quelques remarques générales à propos de l'interprétation de la notion de « bonne foi », pour autant qu'elle concerne les rapports entre celle-ci et la supervision de stipulations exonératrices. Il est évident que le critère de la bonne foi exige de la part des parties une conduite faisant preuve d'honnêteté et d'équité28 dans tout ce qui a rapport à la mise en application du contrat. De manière générale, an peut estimer qu'une action est posée de bonne foi lorsque son auteur non seulement agit de façon intègre29 mais aussi de façon équitable, en pleine considération des autres parties30.

Le principe de la bonne foi est un principe dont la portée est des plus étendues. Diverses fins lui sont assignées, parmi lesquelles figure entre autres la limitation des obligations »31.

Peu de temps après la sortie de l'ouvrage de Shalev, j'ai entrepris d'examiner la nature de la notion de « bonne foi » et comment ce principe, 48 désigné sous le nom de bona fides, fut compris dans le droit romain32. Toutefois, l'objet de la présente étude n'est pas d'analyser la signification donnée à la notion de bonne foi en droit romain. Nous nous contenterons ici de l'explication offerte, par Berger dans son Encyclopedic Dictionnary of Roman Law : « Honnêteté, droiture, bonne foi ; les notions reçoivent plusieurs applications. Généralement, elles sont mises en opposition avec les notions de « mala fides », « fraus », « dolus », « dolus malus ». Certains principes découlent de la notion de « bona fides », comme : « bona fides exige que ce sur quoi les parties se sont entendues soit fait » (D.19.2.2) qui fut énoncée en d'autres termes par l'adage : "bona fides" requiert l'équité la plus grande (honnêteté, "aequitas" en contrats) » (D.16.3.31.pr). Ce qui est malhonnête et immoral est considéré comme étant « contra bonam fidem ». En droit contractuel, le « bona fides » est d'une importance particulière non seulement en raison des principes mentionnés ci-dessus, mais aussi parce que certains types de contrats sont fondés sur la notion de « bona fides », en tant que confiance mutuelle, honnêteté, bonne foi des parties, tant à la conclusion du contrat que lors de l'exécution des obligations assumées. Les procès auxquels ces contrats donnent lieu sont jugés suivant des critères d'équité et d'honnêteté (iudicia bone fidei). Agissant « bona fide » (ex., emere, vendere, solvere, facere) ou exerçant quelque droit relié à une situation factuelle (bone fide possidere) présuppose la conviction de la personne quant à la nature licite de ses actions au fait qu'ils ne portent pas atteinte aux droits d'autrui. S'il s'avère que ses convictions sont erronées, cela pourrait jouer à son détriment, tel un homme libre qui «bona fide » se considère esclave et agit comme tel (liber homo bona fide serviens) »33.

Rien qu'à la lecture de ces brefs énoncés, il ressort que même dans le droit romain, la notion de bonne foi se voit élargir ainsi que mise en application dans de nombreux domaines. De la même manière, il ressort de là, qu'à la longue, l'exigence de bonne foi prit fermement racine dans le continent européen, principalement en raison de l'influence subie par ce dernier du droit romain et du droit canon34. Eu égard à cette expansion de la notion de bonne foi, il n'est donc pas surprenant que plusieurs auteurs s'efforcèrent de cerner les contours légaux de la notion de bonne foi, par crainte que cette exigence ne devienne qu'un vague principe aux contours flous, échappant à l'emprise du droit et relevant plutôt du domaine de l'éthique35. A l'heure actuelle, les régimes continentaux exigent la 49 bonne foi des parties à tous les stades du contrat36 : dès les stades préliminaires de négociation précédant la formation du contrat jusqu'à sa formation effective, son interprétation et l'exécution de ses obligations. Toute action doit être posée de bonne foi. Il n'existe pratiquement aucun geste, qu'il s'agisse soit de la simulatio37, soit de l'enregistrement, où le critère de la bonne foi ne reçoive application.

Dans la présente étude, nous nous concentrerons exclusivement sur la règle de bonne foi qui se rapporte aux phases préliminaires, soit la négociation et la formation du contrat.

A l'heure actuelle, il semble que les juges et les professeurs israéliens soient enfin parvenus à former un consensus concernant le sens à donner à l'expression « de bonne foi et de façon conforme à l'usage ». A cet égard, l'approche du juge Menachem Elon mérite une attention toute particulière. Dans une des premières décisions où cette expression fut interprétée38, le juge Elon, se fondant sur les sources du droit juif traditionnel, a affirmé que : « L'élément fondamental dans la notion de bonne foi est l'intégrité, une exécution complète et correcte [de l'obligation], et du principe essentiel dans le monde de la Halacha [le droit juif traditionnel], qui fut exprimé ainsi : « Et tu feras ce qui est juste et bien dans les yeux de l'Éternel » (Deuteronome 6, 10)39. Conformément à sa manière de comprendre la nouvelle législation, le juge Elon voyait dans le principe de la bonne foi un outil fourni par le législateur aux tribunaux. Il s'en suivait alors que : « Parfois un manque de bonne foi ne correspondra qu'à une conduite enfreignant une norme morale. Cela ne porte pas à conséquence sur le plan du droit et la cour n'interviendra pas. Parfois un manque de bonne foi exige , qu'on tienne responsable celui qui se conduit de la sorte..., le tout selon les circonstances »40.

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Le juge Aharon Barak, actuel président de la Cour suprême, en référence à l'obligation de mener des négociations de bonne foi, a déclaré « L'obligation de négocier de bonne foi et de façon conforme à l'usage signifie que les parties à la négociation doivent se traiter de façon intègre et avec bienséance. Ils ne sont plus étrangers l'un envers l'autre ; la loi crée une certaine intimité entre les parties, et par là donne lieu à des expectatives qui exigent la considération de tous. En effet, les intérêts des parties lors de la négociation divergent et parfois entrent même en conflit. La loi ne demande pas aux parties d'abandonner leurs intérêts au profit de leurs cocontractants. La loi n'exige pas des parties de se comporter l'un envers l'autre comme des anges. Bien que la loi réalise que les intérêts des parties ne concordent pas, elle exige qu'ils soient poursuivis de façon intègre et avec bienséance »41.

A l'audition supplémentaire tenue en l'espèce, le juge Barak a ajouté ces propos : « ... Il s'agit ici d'équité entre des "adversaires" et non entre des "amants" »42.

Dernièrement, certains auteurs ont examinés les difficultés qui entourent la tâche de fournir une définition du critère de bonne foi. Gabriela Shalev, dans son ouvrage général portant sur le droit des contrats israéliens, ainsi que dans un article traitant du principe de la bonne foi, a analysé ce dernier dans le cadre de négociations, tel qu'il est énoncé à l'article 12. Elle affirme : « En effet, le principe de bonne foi a provoqué un bouleversement dans le droit israélien puisqu'il instaure dans un cadre juridique des notions foncièrement éthiques. Cependant, dès lors que ce principe éthique se laisse absorber dans le système juridique et acquiert une certaine légitimité d'un point de vue légal, il ne peut plus être interprété à la lumière de ses origines éthiques et morales. Sa mise en application doit plutôt refléter des expectatives plus modestes et réalistes quant à la conduite humaine ».

« En appliquant le principe de bonne foi, il faut alors mettre en équilibre les considérations éthiques résidant à la source de ce dernier avec les besoins commerciaux de la société. Quoique ce principe implique une désapprobation de l'individualisme et de l'égoïsme, il n'exige pas du même coup un comportement totalement altruiste. Bien qu'il demande que les intérêts de l'autre partie soient pris en considération, cela ne signifie pas pour autant que l'on doit négliger ses propres intérêts. Comme il a été dit dans un jugement de la Cour suprême, quand bien même les parties à une négociation précontractuelle ne sont pas requis de se traiter comme des anges, il n'en découle pas pour autant qu'ils doivent se comporter comme des loups43. L'exigence générale d'agir de bonne foi et de façon conforme à l'usage doit donc être vu comme une exigence 51 que les parties fassent preuve de coopération et de considération afin d'accomplir les buts du contrat »44.

Nili Cohen et Daniel Friedman, tous deux de la Faculté de droit à l'Université de Tel Aviv, ont également examiné le sens de la notion de « bonne foi ». Voici comment ils y font référence dans leur ouvrage « Le devoir [de négocier] de bonne foi crée une relation entre les parties à la négociation. Ils ne sont pas étrangers l'un à l'autre, et ils doivent mutuellement se prendre en considération »45.

Nous devons également garder à l'esprit que, comme nous l'avons souligné ci-dessus, l'article 12 de la loi israélienne sur les contrats établit un devoir d'agir de bonne foi et de façon conforme à l'usage lors de l'exécution d'une obligation contractuelle. A propos de cette disposition de la loi, Shalev écrit : « Il semble que les deux concepts [la bonne foi et l'usage] soient venus au monde légal ensemble. Cependant, la jurisprudence et la doctrine paraissent avoir fait abstraction du volet correspondant à l'usage, ou du moins attachent plus d'importance au concept de la bonne foi ».

« En effet, il semblerait que le terme de l'usage ne fut destiné qu'à définir les contours de la bonne foi. L'expression "de bonne foi et de façon conforme à l'usage" ne doit pas nécessairement être lue comme comportant deux critères, qui doivent chacun être satisfaits. Les deux termes, "bonne foi" et "usage", forment un seul critère. Le volet correspondant à l'usage définit les contours de l'obligation d'agir de bonne foi, et le volet correspondant à la bonne foi détermine ce qui est conforme à l'usage. Toutefois, ce rapport réciproque qu'entretiennent les deux éléments ne fait pas en sorte qu'ils aient la même portée. Le principe de la bonne foi domine, tandis que le volet correspondant à l'usage ne constitue qu'un outil accessoire permettant de déterminer si la bonne foi est présente ou absente ».

Le Pr Shalev interprète ainsi la loi comme ayant adopté la théorie objective de la bonne foi (c'est notre position à partir de 1977), et comme faisant la distinction entre l'usage courant dans les différents secteurs du commerce. Selon la position actuelle de Mme Shalev, quelles que soient les circonstances, c'est le standard objectif de l'usage qui déterminera si la bonne foi était présente entre les parties.

D. - Le contenu du devoir d'agir de bonne foi : une responsabilité de nature objective

D'un point de vue comparatif, l'article 1337 du Code civil italien, qui édicte l'exigence de bonne foi lors de la formation du contrat ressemble de près à la disposition corrélative israélienne ; les deux adoptent un critère objectif plutôt que subjectif quant au comportement des parties.

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Le principe de bonne foi exige alors des parties un comportement juste et correct, prenant en considération les nécessités du commerce, les circonstances, ainsi que la nature particulière de la transaction : honnêteté dans les négociations. L'article 1175 du Code civil italien prévoit : « Le débiteur et le créditeur se comporteront en accord avec les règles de l'équité »46.

Le concept de « correttezza » (équité, honnêteté), paraît facile à expliquer puisque contrairement au concept de bonne foi il ne comporte qu'un seul volet. Toutefois, il importe d'observer que le Code italien fait appel à deux notions, soit « buona fede » et « correttezza », lesquelles, d'une certaine manière, correspondent aux notions de « bonne foi » et « de façon conforme à l'usage » appartenant au droit des contrats israélien.

Les auteurs continentaux ont également éprouvé des difficultés à faire la distinction entre les deux notions : en fait, on pourrait même dire que ces difficultés remontent jusqu'à l'époque du droit romain47. Ainsi, dans un ouvrage consacré aux principes du droit romain, Schulz analysa le problème de la façon qui suit48 : « Notre intention n'est pas d'examiner la doctrine du bona fides (une formule tautologique49 tout comme les formules correspondantes anglaises (« in good faith ») et allemandes (« in gouten triuwen ») dans le droit des contrats. Bona fides comprend l'obligation de garder sa parole... Or, étant donné que la fidélité et l'honnêteté entretiennent de si étroits rapports, l'expression de bona fides en est également venu à dénoter « l'honnêteté ». Dès lors, le principe de bona fides enjoint non seulement de garder sa parole mais aussi d'agir de manière digne d'une personne honnête, avec loyauté et de façon conforme à l'usage. Il s'agit là-aussi d'une obligation, mais d'une obligation distincte de celle de garder sa parole. Cette dernière est soutenue par une conception autre que la notion de loyauté par laquelle nous avons commencé nos observations ».

De l'époque du droit romain nous passons à l'heure actuelle. Même aujourd'hui, comme nous l'avons déjà précisé, il n'est pas aisé de distinguer clairement entre la correttezza et la buona fede. D'après Benatti, qui a consacré toute une étude au sujet de la responsabilité précontractuelle50, l'équité (correttezza) viendrait imposer une obligation négative, soit d'agir avec soin et de s'abstenir de poser tout geste portant atteinte aux intérêts 53 de l'autre partie. Tandis que le principe de la bonne foi (buona fede) viendrait imposer une obligation active, soit de faire preuve d'une attitude coopérative afin de répondre aux attentes des parties.

Betti s'inscrit en faux contre cette théorie51. A son avis, le principe de la bonne foi n'imposerait qu'une obligation négative aux parties lors de la formation du contrat. De la sorte, la bonne foi serait apparentée à l'honnêteté. Toutefois, cette opinion parait être malfondée. Autrement, comment s'expliquerait l'emploi par le législateur de deux expressions distinctes ? Et pourquoi retrouve-t-on ces expressions tantôt individuellement, dissociées l'une de l'autre et tantôt juxtaposées, alliées l'une à l'autre ?

Il importe de noter que le principe de la bonne foi a également pris racine dans le droit américain52. A cet égard, le Uniform Commercial Code (U.C.C.), à l'article 1, 203, dispose : « Obligation d'agir de bonne foi... Tout contrat ou obligation dans le cadre de cette loi renferme le devoir d'agir de bonne foi dans son exécution ou sa mise en application »53.

Le U.C.C. nous offre également une définition de la bonne foi (art. 1, 201, 19) : « « Bonne foi » signifie l'honnêteté en pratique dans la conduite ou la transaction en cause ».

La définition de la bonne foi donnée par l'U.C.C. varie cependant en ce qui a trait aux contrats de vente (art. 2, 103, l b) : « Bonne foi », dans le cas d'un commerçant, signifie l'honnêteté en pratique et l'observance des standards raisonnables de commerce pour traiter équitablement54.

A la lumière de ce bref survol comparatif, nous pouvons retourner au droit israélien et tenter, de dégager le sens de l'article 12 (a) de la loi sur les contrats. En premier lieu, an peut soulever quelques interrogations 54 quant à la nature du critère de la bonne foi : s'agit-il d'un critère subjectif ou objectif ? Bien que la question ait été soulevée par Dalia Eben lors de l'étude du projet de loi, elle demeura sans réponse55. Gabriela Shalev, comme il est mentionné ci-dessus, préférait originellement un critère subjectif56. Notre survol du droit continental, accentuant tant le droit allemand que le droit italien57, nous mena à la conclusion certaine que ces deux régimes optèrent pour un critère objectif Ce choix nous parait également correspondre à la solution la plus souhaitable pour le droit israélien. Nous sommes de l'avis que, contrairement à d'autres situations, tel l'achat de la chose d'autrui, lorsqu'il s'agit de négociations précontractuelles, un critère subjectif, voire psychologique ne devrait pas recevoir d'application. Dans ces situations la vente demeure valable pour autant que l'acheteur ait agit de bonne foi. Par contre, pour ce qui a trait aux négociations précontractuelles, l'élément déterminant est la présence d'une conduite honnête et équitable. Dans ce cas s'impose une conduite en accord avec l'usage local pour le genre de transaction faisant l'objet des négociations, les besoins du commerce, ainsi que les intérêts du cocontractant. Bien que la mauvaise foi entache fréquemment le comportement des parties lors des négociations, elle ne peut franchir certaines limites. Par ailleurs, il n'est pas inutile de rappeler qu'à partir de 1804, année d'adoption du Code civil français, la tendance a toujours été de remplacer les critères subjectifs par des critères objectifs dans le but de mieux protéger les parties défavorisées.

Un manque de bonne foi ne doit pas nécessairement découler d'un « dolus » ; il peut tout autant constituer le résultat d'une conduite négligente. Dans ces cas, il se pourrait qu'une partie aux négociations, agissant subjectivement de bonne foi soit considérée comme ayant manqué à cette obligation selon le critère objectif. Un exemple serait, lorsque suite à de la négligence ou de la témérité une partie manque à son obligation d'informer la partie adverse, d'agir avec discrétion, ou de sauvegarder l'objet58. Grâce au principe de la bonne foi objective, une partie défavorisée lors des négociations se trouvera alors à être mieux protégée. Cependant, il me semble du même coup que la réputation de la partie ayant causé le dommage bénéficiera sur le plan des stigmas moraux et sociaux, l'absence 55 de bonne foi selon le critère objectif étant perçue comme une affaire moins grave qu'un manque de bonne foi commis subjectivement59.

Passons maintenant à la jurisprudence. Depuis la première publication de cet article, quelques années après que la loi ait été mise en vigueur, la Cour suprême d'Israël eut l'occasion d'examiner la question de la bonne foi à plusieurs reprises. De sorte qu'aujourd'hui, il ne reste aucun doute que selon le droit israélien, tel qu'il est interprété par la Cour suprême, tant l'article 12 (a) que l'article 39 de la loi sur les contrats font référence à la doctrine de la bonne foi objective.

Même avant l'entrée en vigueur de la loi sur les contrats, le juge Kister, en référence à l'expression « de façon conforme à l'usage » apparaissant à l'article 6 de la loi sur la vente, 5728-1968, a remarqué : « L'intention du législateur n'a pu se référer à l'usage courant entre tricheurs ; ainsi, les parties dans une négociation doivent agir de façon conforme, à l'usage avec bienséance »60. Le premier juge de la Cour suprême a avoir soulevé la question, à savoir si le critère de la bonne foi énoncé à l'article 12 est de nature subjective ou objective, fut le juge Levin dans l'affaire de Kot c. l'Organisation des Locataires61. Et bien que la question soit demeurée irrésolue dans cette dernière affaire, l'examen des décisions subséquentes de la cour nous permettra de mieux retracer le développement de la jurisprudence et facilitera la tâche d'élucider la position de la Cour sur ce point.

Dans l'affaire Spector c. Zarfati62 la cour a décidé à l'unanimité qu'il existe bel et bien un devoir de divulgation dans le cours des négociations. Toutefois, les juges ne furent pas d'un commun accord à propos de l'interprétation à donner à l'article 12 (a). Après avoir parcouru les différentes perspectives sur la question, le juge Asher arriva à la conclusion qu'il était de l'intention de la législature israélienne que « la négociation d'un contrat de bonne foi comprenne une conduite empreinte d'intégrité et d'équité ». Adoptant par là, semble-t-il, la théorie objective de la bonne foi63, le vice-président Landau, quant à lui, se rallia plutôt du côté de la théorie subjective de la bonne foi. Se basant sur les dispositions de la loi sur les contrats concernant l'erreur et le dol ainsi que sur le principe général de la bonne foi et l'autorité du tribunal d'ordonner l'exécution du contrat, il affirma que « ... nous ne saurons instaurer un niveau trop élevé de moralité pour la négociation de ce genre de transactions, car autrement, cela ne pourrait avoir pour effet de compromettre la stabilité du commerce... ». De la Sorte, il se déclara en accord avec la position de G. Shalev à l'effet que le devoir de divulgation ne s'applique qu'en 56 rapport aux détails essentiels non accessibles à l'autre partie64. Le juge Y. Kahan se rallia à l'opinion du juge Landau, s'exprimant dans des termes plus exacts : « Les interprètes de cet article sont divisés quant à savoir si la bonne foi dans les négociations renferme un élément subjectif ou objectif ». Il opta pour le modèle subjectif, se fondant sur le sens courant de la formule, et proposa que telle soit la règle, spécialement pour ce qui est du stade précontractuel. « Puisque subjectivement le vendeur agit avec intégrité », il conclut, « il ne peut être dit qu'il manque à l'obligation de l'article 12 (a) ».

Le point culminant dans le développement de l'opinion de la cour en faveur du standard « objectif » de la bonne foi survint dans la décision du juge Barak dans l'affaire de Services de Transportation Be'er Sheva c. Le tribunal du travail65.

Dans sa décision, le juge Barak différencia l'interprétation à donner au principe de la bonne foi dans le cadre de la loi sur les contrats de l'interprétation qu'il recevrait dans d'autres lois. Selon lui, bien que l'état d'esprit de l'acteur constitue le facteur déterminant lorsqu'il s'agit de préférer son droit à un autre (le principe de Market Overt), tel n'est pas le cas quand il est question de fixer la conduite requise lors de l'exercice d'un droit : « Ici, il s'agit d'une obligation d'agir avec intégrité, équité et loyauté... A cet égard, il me semble que la conviction d'une partie au contrat que sa conduite est empreinte d'équité et d'honnêteté ne peut constituer un élément déterminant car il se pourrait qu'il soit guidé par des standards problématiques d'équité et d'intégrité... il est inconcevable et même injuste que le niveau de conduite exigé diffère pour chaque partie au contrat, étant sujet aux conceptions et croyances de chacun quant à savoir ce qui est honnête et ce qui est équitable. Les mérites [du critère de la bonne foi] étant relié à l'intégrité, la loyauté et l'équité, ne peuvent dépendre de considérations d'ordre subjectif. Ils doivent plutôt reposer sur les standards moraux de la société israélienne tel que la Cour les comprend au moment de la cause ».

Le juge Barak reconnaît certains aspects d'ordre subjectif dans la conduite de l'homme raisonnable, à la lumière du contrat spécifique ainsi que les circonstances particulières. Il souligne cependant la difficulté de prétendre à la nature équitable d'un acte lorsque ce dernier dévie du commun et de l'usage66.

Bien que l'affaire Services de Transportation Beer Sheva c. Le tribunal du travail ait traité de l'obligation d'exécuter un contrat de bonne foi (art. 39 de la loi sur les contrats), elle servit de précédent au juge Barak deux ans plus tard dans la cause de Raviv c. Beit Yoles, où il réitéra la même interprétation en relation avec l'article 12 (a)67. Dans les deux décisions il instaura un « double critère » afin d'apprécier la conduite des parties, « où les principes objectifs d'intégrité et d'honnêteté agissent en 57 commun avec les principes subjectifs, eu égard, entre autres, à la nature de la transaction et les parties au contrat ». Quand bien même il reconnaît le besoin d'avoir recours à des éléments subjectifs dans l'appréciation de la bonne foi, le juge Bar k réaffirme son point de vue à l'effet qu'il n'y a aucunement lieu d'accorder d'importance à la perception subjective des parties quant à la nature de leur conduite68. Un an après, le président de la Cour suprême, Meir Shamgar, adopta cette interprétation lors de l'audition supplémentaire dans l'affaire de Pnidar c. Castro69, ainsi que dans d'autres jugements.

II importe d'insister qu'à notre avis l'interprétation offerte par le juge Barak correspond en vérité à une interprétation objective de l'article 12, et non à une interprétation « mixte », tel qu'il le désigne. Prenons par exemple le sens que prête le juge Barak à la notion de « caractère des parties ». D'après nous, il est parfaitement objectif de prendre en considération la position de l'autre partie au contrat, qu'il s'agisse d'avocats discutant ou négociant dans le bureau d'un confrère ou de commerçants dans un marché pur fermiers. Le critère variera en fonction de l'ensemble des circonstances parce que, d'un joint de vue objectif, il faut que la partie considère la personne envers qui elle doit agir de bonne foi. Ainsi, lors de la négociation d'une transaction immobilière entre un avocat et un simple veneur ignorant toutes les exigences de forme et de fond applicables à une telle affaire. Le devoir d'agir de bonne foi interdirait à l'avocat de tirer avantage du manque de connaissances légales de l'autre partie (ex : le besoin d'un contrat écrit, les questions rattachées à l'enregistrement, les possibilités de prendre une hypothèque) et l'obligerait à lui fournir toutes les informations nécessaires. Est-ce que la loi imposerait des obligations semblables à l'avocat s'il faisait face à un confrère ? ou un agent immobilier ? Quand bien même, que dans de tels cas, la loi imposerait quelques obligations, elles ne seraient certainement pas de la même envergure. Peut-on conclure alors que le niveau de moralité requis varie en fonction e la personne en case ? Évidemment non. Est-ce que l'imposition d'un critère subjectif implique nécessairement qu'il soit irréconciliable avec un test objectif ? Encore une fois, la réponse est négative. Un avocat n'est point tenu d'aviser son confrère qu'un contrat de vente immobilière doit être rédigé par écrit pour qu'il lie les parties. Tel que nous l'avons démontré ci-dessus, les exigences de bonne foi peuvent très bien différer de situation en situation, de telle sorte qu'une personne non familière avec le système juridique pourrait, à tort, déceler des « éléments subjectifs » à partir de la nature du contrat et des parties à la négociation. Cependant, la bonne foi sera en tout état de cause appréciée de façon objective, quelques soient les circonstances de l'affaire, et découlera toujours des attentes spécifiques des parties à ce que les affaires soient menées avec équité, intégrité et bienséance.

Récemment, deux auteurs de l'Université de Tel Aviv, Daniel Friedmann et Nili Cohen, tentèrent de cerner l'essence de la nature objective 58 du principe de la bonne foi contenue dans la loi sur les contrats à la lumière des droits corrélatifs de l'autre Partie. Ils considèrent que l'intention résidant dans l'exigence d'agir de bonne foi et de façon conforme à l'usage est d'instaurer, des normes d'équité dans la vie commerciale, de sorte que « le standard afin d'évaluer le devoir d'agir de bonne foi et de façon conforme à l'usage soit objectif plutôt que subjectif. Quand bien même il s'agirait d'un standard objectif atténué, prenant en ligne de compte la transaction spécifique ainsi que la nature des parties »70. Dans ce contexte, l'acte de prétendre que « je ne savais pas » ne peut être accueilli, car, selon eux, un tort engendré par négligence ne peut être vu comme étant pose de bonne foi. Cependant, ils rapportent trois situations où le facteur subjectif joue un rôle significatif. Ils mentionnent premièrement la capacité des parties d'imposer d'un commun accord leurs propres méthodes de négociation, limitant ainsi la portée du principe de bonne foi (nous attirons l'attention du lecteur sur ce que, même dans un tel cas, le critère préserve sa nature objective, puisque ce sont les parties, entre elles qui ont décidé ; l'objet de la loi est de protéger contre la dépendance d'une des parties vis-à-vis de l'autre). La deuxième situation à laquelle ils se réfèrent, est une clause dans le contrat exonérant les parties de toute responsabilité pour des torts causés pendant le cours des négociations (à notre avis, une telle possibilité est très restreinte, à la lumière de l'article 12, tel que nous l'interprétons, comme jus cogens). Les auteurs soulèvent une dernière situation où une partie fourvoie l'autre de bonne foi et sans négligence. Dans cette dernière éventualité, la partie en tort n'est pas responsable en vertu de l'article 12 (a), bien que le contrat soit susceptible d'être annulé selon l'article 15. Finalement, les auteurs ajoutent que dans les trois situations, une partie n'est aucunement autorisé à induire l'autre partie en erreur puisque cela constituerait un manquement au principe de la bonne foi subjective auquel les parties n'ont jamais renoncé71.

Il faut dire que les différences opposant l'approche subjective à l'approche objective sont plus considérables qu'il n'apparaît à première vue. En effet, interpréter l'exigence de bonne foi comme étant de nature subjective, c'est se rallier du côté de ceux qui, à la naissance du droit moderne des contrats, militaient en faveur du principe de la liberté contractuelle postulée par le Code Napoléon de 1804. Mais à partir de là, il se manifeste un mouvement constant et progressif vers une appréciation objective du principe de la bonne foi. Il s'agit, dès lors, de mettre beaucoup moins l'accent sur l'offre comme déclaration de volonté, pour mieux prêter attention à la partie destinataire se fiant en droit à cette déclaration. Le monde moderne des contrats prend de plus en plus en ligne de compte des considérations d'ordre objectif, telle celle de comment l'autre partie perçoit les pourparlers, et le principe de la confiance (reliance). Cette tendance se manifeste dans tous les aspects du droit des contrats, y compris les aspects précontractuels.

59

E. - Quelques cas pratiques de mauvaise foi

A la suite du survol général présenté ci-dessus, nous nous efforcerons maintenant d'examiner de façon plus détaillée la jurisprudence et la doctrine afin d'y trouver quelques exemples pratiques où l'obligation d'agir de bonne foi au cours des négociations entre en jeu.

On peut rétrospectivement constater que l'explication et la mise en pratique de la loi sur les contrats effectuées au cours des vingt dernières années, ont donné lieu à une période de coopération particulièrement féconde entre les juges et la doctrine dans l'élucidation du modèle israélien de la bonne foi. Comme cela a été indiqué ci-dessus, ce passage a été effectué sans produire d'effets nuisibles sur l'économie israélienne. Ce fut une évolution du régime acquis lors du mandat britannique fondé sur la Common Law vers un régime de droit civil calqué sur le modèle continental. A cet égard, nous osons espérer que notre expérience positive pourra servir de leçon et de modèle au Royaume Uni et qu'elle poussera ce dernier à adopter cette importante doctrine légale qu'est la doctrine de la bonne foi tant en ce qui a trait aux stades contractuels que précontractuels, et harmonisera son système légal avec celui des autres membres de l'Union européenne.

En 1977, nous énoncions que le principe de bonne foi devait surtout recevoir application en ce qui a trait aux cessations injustifiées des négociations. Quant bien même le principe de bonne foi pourrait recevoir une application dans d'autres domaines (que nous aborderons dans un moment), il nous paraît nécessaire de noter que souvent l'application du principe de la bonne foi en ces circonstances procède logiquement de la règle concernant la cessation injustifiée des négociations et pourrait même constituer un motif acceptable à cet égard. Il n'y a aucun tort, à notre avis, de s'engager dans des négociations avec aucune intention de les poursuivre jusqu'au bout, ou de mener des négociations parallèles, ou même, à certains égards, de présenter des demandes illégales. Le tort est commis seulement quand ces actions mènent à la cessation injustifiée des négociations, à la déception de l'autre partie, qui ne pouvait entrevoir au préalable ces développements nuisibles. La liberté contractuelle comprend le droit de se retirer des négociations, et ce droit doit être protégé, mais non au dépens du droit de l'autre partie qui, lui aussi, a besoin d'être protégé. Cette protection lui est offerte par le principe de la bonne foi : intégrité raisonnable et équité. Nous favorisons généralement cette position des tribunaux.

Nous allons maintenant aborder les quelques « cas concrets » retrouvés Dans la jurisprudence au sujet de la rupture des négociations.

Il est clair qu'une partie peut également engager sa responsabilité pour un manque de bonne foi Dans le domaine précontractuel, en vertu du standard objectif, lorsque le contrat conclu contient des termes défavorables à une des parties. Dans de tels cas il sera nécessairement plus difficile de déterminer avec précision les conséquences entraînées par le manque de bonne foi et, du même coup, les dommages pour lesquels il faudra verser une indemnité. La loi fait expressément référence à de telles situations lorsqu'elle prescrit que : « 12 (b) Une partie... sera responsable... 60 pour les dommages causés... en conséquence des négociations et de la formation du contrat... ».

On se rappellera que le principe de bonne foi s'applique tant aux contrats entre individus qu'aux contrats avec les autorités publiques.

1. Interruption injustifiée des négociations

L'interruption injustifiée des négociations constitue un problème bien plus compliqué, posant des difficultés considérables. Dans de telles situations, le droit à la liberté contractuelle entre en opposition avec la nécessité de compenser la partie lésée suite à l'exercice abusif de ce droit. En vérité, il s'agit plutôt ici d'un conflit entre les intérêts du commerce et l'intérêt d'assurer la bonne foi. Il nous parait évident que dans ce cas la loi ne peut imposer la poursuite des négociations : l'article 3 (a) de la loi sur les contrats prescrit, que dans le cours des négociations « celui qui présente une offre peut la retirer en donnant avis au destinataire... ». Ce principe s'applique alors d'autant plus, avant que l'offre ne soit présentée. Il en découle alors que le retrait des négociations serait permis en vertu de la loi. Mais en ressort-il également qu'une partie peut se retirer des négociations sans justification sans encourir de responsabilité et sans indemniser la partie lésée ? Pour certains auteurs, c'est la solution qui s'impose.

A l'heure actuelle, le consensus est qu'un retrait injustifié des négociations constitue un manque de bonne foi qui peut donner lieu à une obligation d'indemniser l'autre partie. Bien qu'il soit clairement plus facile de justifier un retrait effectué quand la négociation est encore à ses débuts, il n'est pas inconcevable que même la partie qui se retire au tout début de la négociation engage sa responsabilité. Par exemple, X invite Y d'une autre ville à entamer de négociations et soudainement se retire sans justification des négociations. Dans un tel cas il parait raisonnable d'exiger de X qu'il dédommage Y pour les dépenses encourues.

La doctrine italienne a développé la théorie des « activités permises mais nuisibles » (atti leciti dannosi)72. D'après cette doctrine, celui qui exerce un droit assume le risque qui en découlent73. Le droit italien fait appel à cette doctrine afin de fonder la responsabilité de celui qui met fin sans justification à des négociations74. Cette solution nous semble 61 juste et logique. Elle prend en ligne de compte tous les éléments mentionnés ci-dessus et tente d'arriver à un compromis. Une autre solution proposée par le droit italien consiste à autoriser chacune des parties à mettre fin aux négociations, pour autant que cela se fasse en conformité avec le principe de la bonne foi. Une illustration d'une telle situation correspondrait au cas où une partie poursuit des négociations sans avoir l'intention ou la possibilité de conclure un contrat profitable. Dans un tel cas, la partie engagera sa responsabilité même si sa conduite pousse l'autre partie à interrompre les négocitions75. Nous préférons la première solution, en dépit du fait qu'elle soit un peu plus complexe76.

Le droit italien fera face à des difficultés semblables lorsqu'il s'agira de caractériser la rétractation d'une offre ou d'une notification d'acceptation77. D'après la théorie prévalente, tant l'offre que la notification d'acceptation, constituent des activités précontractuelles (atti prenegoziali)78. Cependant, une discussion détaillée sur cette question nous mènerait hors des limites de notre sujet.

En examinant tant la jurisprudence que la doctrine israélienne à ce sujet, nous nous apercevons que l'approche proposée par ces dernières s'apparente beaucoup à la démarche italienne. Nous en trouvons une illustration dans un extrait de l'ouvrage de Shalev où l'auteur accepte qu'une partie engage sa responsabilité du fait d'une interruption injustifiée des négociations. L'auteur écrit : « Le lien entretenu par les parties à des négociations précontractuelles est moins contraignant que celui découlant d'une relation contractuelle. L'objet des négociations précontractuelles 62 consiste non seulement à déterminer le contenu du contrat mais aussi à permettre aux parties d'évaluer si, tout compris, ils sont prêts à établir une relation contractuelle. Il en ressort alors qu'en principe le droit de se retirer des négociations appartient aux parties. La seule limite apportée à ce droit découle du principe de la bonne foi. Une partie rompt les négociations de bonne foi lorsqu'elle se fonde sur des considérations qui sont liées à la nature de la transaction »79.

Selon la doctrine israélienne, tout acte provoquant la cessation des négociations, telle la rupture d'une promesse ou l'omission de répondre aux attentes de l'autre partie, correspond à ce qui fut caractérisé comme « un abus des règles du jeu dans le domaine contractuel » ; à distinguer de la responsabilité précontractuelle pour les fautes volontaires, qui se rattache habituellement à un contrat déjà conclut. D'après cette perspective, il ne serait pas conforme aux principes fondamentaux du droit des contrats que les parties puissent engager leur responsabilité avant que le contrat ne soit encore formé. Telle est la position prise par les Prs Friedmann et Cohen. Ils écrivent : « Mener des négociations n'oblige pas les parties à conclure un contrat. Celui qui entre dans des négociations assume le risque d'en sortir sans contrat. Cette règle découle de l'envers du principe de la liberté contractuelle, c'est-à-dire, le droit de ne pas être engagé tant que les parties ne se sont pas encore entendues pour conclure un contrat. L'article 12 assume aussi cette règle, tout en en atténuant la portée »80

Nous partageons également ce point de vue : en effet, c'est cette considération qui nous a poussé à limiter la responsabilité des parties aux négociations, au cas où les négociations se verraient interrompues sans justification. Nous nous trouvons aussi en accord avec la position de la jurisprudence, telle qu'elle fut exprimée par le président de la Cour suprême, le juge Shamgar : « La visée de l'article 12... n'est pas d'imposer aux parties aux négociations l'obligation de conclure un contrat à toute condition et à tout prix et de forcer sous peine d'avoir à indemniser l'autre partie, celui qui décide, à sa discrétion, qu'une affaire qui lui est offerte ne lui est pas utile ou souhaitable même s'il s'avert qu'objectivement sa décision a été mal fondée »81.

Un exemple spécifique d'un acte posé contrairement au principe de bonne foi apparaît à l'article 3 (b) de la loi sur les contrats relativement à la rétractation d'une offre irrévocable. Cette disposition prescrit que : « Lorsqu'il est déclaré que l'offre est irrévocable ou que la période d'acceptation est limitée dans le temps, elle ne peut être retirée une fois transmise au destinataire ».

63

Dans l'affaire Shikum Ovdim c. Japnik82, un entrepreneur avait publié un avis de vente invitant le public à procéder à l'achat d'immeubles dans des conditions attrayantes. Afin de profiter de ces conditions il était cependant requis de s'inscrire au préalable au bureau de l'entrepreneur et de remplir certains formulaires avant la date d'échéance inscrite sur l'avis de vente. En dépit du fait qu'ils se soient présentés en temps voulu, M. et Mme Japnik ne sont pas parvenus, en raison du nombre de postulants, à s'inscrire auprès du bureau de l'entrepreneur. En d'autres termes, c'est suite à la faute de l'entrepreneur que les destinataires se virent refusés ce que la Cour perçut comme une offre irrévocable dont l'acceptation nécessitait la coopération de son auteur. Le juge Ben-Porat énonçât, à juste titre, le principe voulant que lorsqu'une partie fait une offre irrévocable et que son acceptation nécessite une certaine coopération entre le destinataire et son auteur, ce dernier ne peut se comporter de façon à lui faire échec ; autrement, il engagerait sa responsabilité en raison de son absence de bonne foi83.

Il apparaît alors que tant la doctrine que la jurisprudence israélienne concordent avec l'énoncé trouvé à l'article 2.15 des Unidroit Principles of International Commercial Contracts, traitant des négociations de mauvaise foi. Cette disposition prévoit que : « 1) Une partie est libre de négocier et n'est point responsable pour l'impossibilité de parvenir à un accord. 2) Toutefois, une partie qui négocie ou rompt les négociations de mauvaise foi est responsable pour toute perte causée à l'autre partie »84.

1.1. L'absence d'intention contractuelle

Nous examinerons d'abord le cas où une des parties aux négociations agit sans aucune intention de conclure un contrat. Les précédents israéliens concordent avec la règle édictée à l'article 2.15 (3) des Unidroit Principles : « Il est de mauvaise foi, en particulier, pour une partie d'entrer dans des négociations ou de les continuer avec l'intention de ne pas arriver à un accord avec l'autre partie ».

Commençons d'abord par la doctrine ; il faut souligner d'emblée que de telles situations peuvent survenir tant dans le domaine du droit privé que dans le domaine droit administratif public ; comme l'a noté le Pr Shalev : « L'entrée dans des négociations sans aucune intention de former un contrat, la participation à des négociations sans intention de définitivement conclure un contrat, ainsi que la signature d'un contrat 64 sans l'intention de l'exécuter ou en sachant qu'il ne sera pas respecté - toutes ces conduites constituent une violation de l'article 12 »85.

La Cour suprême va à cette même conclusion dans l'affaire de Dar c. Le Comité des Soumissions de la Municipalité de Kiryat-Bialik86. Cette affaire tournait autour d'un appel public d'offres proposé par la municipalité : L'appel d'offres comportait deux contrats alternatifs. Aucun des soumissionnaires ne furent capable de se conformer à la première alternative, qui fut la plus profitable pour la municipalité, et le comité des soumissions refusa de considérer les contrats offerts en vertu de la deuxième alternative. L'opinion de la Cour, rédigée par le juge Barak, déclara que les négociations ne furent pas entreprises de bonne foi, puisque la municipalité n'avait jamais eu l'intention d'accepter les soumissions. Tant d'après le droit public que le droit privé, dit le juge Barak, « celui qui présente une offre assume le risque que son offre ne sera pas acceptée, mais, par contre, il n'assume pas le risque que le soumissionnaire n'ait jamais voulu conclure le contrat »87.

1.2. Reniement d'engagements antérieurs

Des difficultés peuvent également survenir lorsque les parties arrivent à un accord partiel ; Friedmann et Cohen expliquent : « Dans les cas où les parties arrivent à un accord partiel, laissant certaines questions à être résolues ultérieurement, les circonstances peuvent laisser croire qu'une entente tacite s'est formée à l'effet que seules ces questions pourraient, à l'avenir, fonder un retrait des négociations. Mais ce n'est pas évident. Il arrive parfois que l'accord partiel soit de nature temporaire, comportant certaines réserves qui pourraient être interprétées comme stipulant que tant qu'un accord final n'est pas conclu - toutes les questions demeurent sujets à négociation. Néanmoins, il se peut aussi qu'un accord partiel soit interprété comme étant de nature finale et qu'il y soit sous-entendu que toute demande présentée à l'avenir ne pourra que concerner les questions encore non-résolues »88.

Dans la cause de Sonnensten c. Gabasso89, le juge Ben-Porat, ancien député, président de la Cour suprême, fut de l'avis que lorsqu'au cours des négociations les parties forment une entente à propos de certaines questions reliées au futur contrat, mais remettent à plus tard la conclusion même du contrat, dans l'intention que seule la signature de l'écrit aura pour effet de lier les parties, ces dernières continuent à posséder le droit de retrait, pour autant que ledit contrat demeure inconclu. En l'espèce, 65 par exemple, l'absence d'une entente concernant les termes de paiement constitua un des motifs empêchant la reconnaissance de la validité d'un contrat inachevé pour la vente d'un appartement.

Une des critiques dirigées contre la décision du juge Ben-Porat par le Pr Shalev a porté sur ta nature obligatoire des accords préliminaires. Selon elle, la validité, ainsi que la nature obligatoire d'accords antécédents doivent être examinées à la lumière des principes du droit général des contrats : l'intention expresse ou tacite des parties. Tantôt les accords préliminaires sont censés lier les parties à partir du moment où ils sont conclus et tantôt la validité de ces accords dépendra de l'entente qui sera formée ultérieurement à propos des questions encore non résolues. (Une telle entente pourrait même se voir appliquée par le tribunal, suivant la loi ou l'usage). Autrement dit, ces accords ne constituent rien de plus que la « matière première » du contrat final. Quoi qu'il en soit, une chose est claire : il incombe toujours aux parties de tenter d'arriver à un accord final. Chaque partie détient le droit de se retirer des négociations, pour autant que cela se fasse de bonne foi. Ainsi, la renonciation à un accord préliminaire interprété comme liant les parties, constituerait une violation contractuelle ; si le principe de la bonne foi doit recevoir application ici, c'est plutôt en ce qui a trait au devoir d'exécuter ses obligations contractuelles et au devoir d'exercer ses droits de bonne foi, et non en ce qui a trait au devoir de négocier de bonne foi90.

1.3. Demandes illégales

L'affaire de Sonnenstein c. Gabasso, dont nous avons traité précédemment91, aborda également la prétention d'une des parties à l'effet que son cocontractant aurait inclut dans le contrat une demande illégale.

Les requérants, un couple marié, étaient prêts à conclure les négociations avec la partie intimée, un entrepreneur auquel ils désiraient acheter un appartement lorsque les pourparlers furent interrompus. Les parties avaient résumé dans un mémorandum les points sur lesquels ils étaient parvenus à un accord, ce qui comprenait le prix de vente, avec un ajout à l'effet que les termes de paiement seraient déterminés à une date ultérieure. Au cours de ce qui était censé être la dernière occasion pour déterminer les négociations et signer le contrat final, les parties ne parvinrent pas à finaliser l'entente. A l'audition, les requérants réclamèrent que l'accord énoncé au mémorandum soit exécuté, en plus d'une indemnisation pour les dommages encourus ; ils prétendirent que lors de la dernière séance des négociations le vendeur avait exigé qu'une fraction du prix de vente lui soit payée « sous la table » afin de ne pas avoir à payer des impôts, et que cela allait, à l'encontre du principe de la bonne foi dans les négociations. L'intimé contesta cette présentation des faits, et bien 66 que les juges soient de l'avis qu'un jugement quant aux faits n'était pas nécessaire, ils se prononcèrent au sujet des demandes illégales.

Le juge Ben-Porat fut de l'opinion que tant que le contrat demeure inconclu, chaque partie possède le droit de revoir des détails ayant déjà forme l'objet d'une entente, et de présenter des demandes illégales, tel était le cas en l'espèce. Elle fit une distinction entre, d'un côté, la nature illégale d'une demande et, de l'autre, le droit accordé à une partie selon le droit des contrats de f e une telle demande. D'après elle, la présentation d'une demande illégale, ne constituerait pas, en tant que telle, un indice de mauvaise foi : « la nature fautive de la demande est une chose, et la question de la bonne foi, une autre ». Le juge Ben-Porat a jugé qu'il manquait dans l'entente contenu au mémorandum trop de détails essentiels et que pour cette raison il ne revenait pas à la Cour de suppléer au contrat ; elle rejoint ainsi le juge Beisky en rejetant l'appel.

Dissident, le juge Barak estima que la présentation d'une demande illégale devrait être considérée comme un acte posé de mauvaise foi, donnant droit au requérant d'exiger l'exécution du contrat. Le juge Barak déclara même qu'il y aurait lieu dans de tels cas d'atténuer l'exigence d'un contrat écrit en matière immobilière prévue à l'article 8 de la loi sur les biens immobilier, 5729-1969 : « Un projet en vue d'effectuer une transaction portant sur un bien immobilier exige un document écrit ».

Cette décision donne lieu à de grands débats parmi les auteurs concernant la question de savoir si la seule soumission d'une demande illégale lors des négociations correspondait à un manque de bonne foi ; G. Shalev, qui fut en accord avec l'opinion du juge Ben-Porat, écrivit : « Étant donné qu'en ce qui a trait à des négociations, le principe de bonne foi fut interprété comme étant une exigence "interne", prenant en considération les intérêts de l'autre partie, tandis que l'exigence de légalité constitue une exigence externe cet auteur est de l'avis que seule la soumission d'une demande illégale ne peut, en soit, équivaloir à un manque de bonne foi »92.

Les Prs D. Friedmann et N. Cohen pensèrent autrement. Selon eux, à s'en tenir à la version des faits du requérant, le retrait des négociations par le vendeur devrait être considéré comme un manque de bonne foi en vertu de l'article 1293. Le fait que le vendeur s'obstine quant à une demande illégale aux dernières étapes de la négociation est contraire aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 12. Bien que Friedmann et Cohen furent d'accord avec le dispositif du jugement du juge Barak, ils n'acceptèrent pas sa conclusion à l'effet qu'une absence de bonne foi pourrait justifier la création d'un contrat par la Cour : à leur avis, il aurait suffit d'indemniser le requérant pour les dommages encourus94.

A notre avis, la position du juge Barak est entièrement justifiée. Il ne s'agit pas ici uniquement d'une action illégale commise par une partie aux négociations, il s'agit plutôt d'une demande explicite par laquelle 67 l'autre partie se voit exigée, comme condition préalable à la formation du contrat, de s'engager à commettre une action illégale. Étant donné que seul le refus de son vis-à-vis suscita la cessation des négociations, il n'y a aucun doute que, du fait de la présentation de la demande, cette partie a fait preuve de mauvaise foi.

A propos de la question générale de l'illégalité dans les négociations, Friedmann et Cohen écrivent : « Si le contrat est conclu et que lors des négociations toutes les parties se sont entendues pour frauder le fisc, le caractère illégal des négociations sera opposable à tous ceux qui invoquerait par la suite l'absence de bonne foi de ses cocontractants. Mais si en l'occurrence, une des parties à la négociation n'a pas été avisée de la résolution illégale, le fait tour lui de n'avoir pas été informé sera considéré comme constituant de la mauvaise foi ».

« Encore une fois, à moins que la partie n'ait jamais été avisée de l'illégalité, quand un contrat n'est pas conclu, une partie ne peut prétendre que le retrait de son vis-à-vis des négociations constitue un manque de bonne foi (même si le retrait est effectué vers la fin des négociations). Une partie possède alors le droit de se retirer des négociations, même si ces dernières sont en voie d'aboutir, lorsque son vis-à-vis fait une demande illégale, et elle n'aura pas, de ce fait, agit de mauvaise foi. Par contre, la partie qui soulève une telle demande sera considérée de mauvaise foi si elle se retire des négociations en raison du refus de son vis-à-vis, spécialement si cela se fait lorsque la négociation se trouve dans ses dernières étapes, car dans ces cas le droit de retrait ne peut être exercé en l'absence d'une raison légitime »95.

Selon nous, le débat devrait porter sur une autre question, plus importante. Il faut reconnaître que la présentation de demandes illégales dans le cours d'une négociation ne surprend aucun négociateur, étant donné que cela fait tout simplement partie des mœurs dans le milieu des affaires d'aujourd'hui. Mais vu qu'il est tout à fait inconcevable que la loi sanctionne une telle entente, il s'en suit que toute demande illégale présentée dans le cours d'une négociation devra être abandonnée si l'autre partie refuse de l'accepter. Dans le cas où la partie s'obstinerait dans sa demande, refusant de poursuivre les négociations à moins que son vis-à-vis ne signe une entente sur ce point, la position du juge Barak nous semble être la plus appropriée, et la partie obstinée devra être tenue d'indemniser son vis-à-vis pour les dépenses encourues dans le cadre des négociations. En arrivant à cette conclusion, nous nous appuyons sur le principe, récapitulé à l'aide d'une citation du Pr Shalev, que « ... cela va déjà au-delà des expectatives raisonnables dans le milieu du commerce »96. Nous avons répété à plusieurs reprises que le principe de la bonne foi prend en ligne de compte la pratique commune et raisonnable. Étant donné que celui qui conditionne la conclusion d'un contrat sur l'acceptation d'une demande illégale n'agit pas de façon raisonnable, il doit subir les conséquences de 68 ses actions. Il s'agit évidemment là d'un énoncé de principe général qui doit toujours être appliqué eu égard aux circonstances particulières en cause.

2. Manquement à l'obligation d'information

Il n'est pas surprenant que la question de savoir si une partie aux négociations est tenue de divulguer certains faits à son vis-à-vis - quand bien même l'absence de divulgation ne consiste pas en soi un dol - a pris de l'importance dans le cadre de l'article 12. En effet, an se rappellera que le cas auquel Jhering fit référence dans son article de 1861 porta sur le manquement d'une partie d'informer son vis-à-vis de faits qui auraient entaché le futur contrat de nullité.

Lorsque le droit israélien des contrats était encore à ses débuts, voire lorsque la Common Law britannique demeurait encore sa principale source d'inspiration, la maxime caveat emptor constituait la règle générale. Évidemment, les tribunaux israéliens absorbèrent aussi les développements subséquents qu'a connu le droit anglo-américain ayant pour effet de tempérer les conséquences difficiles de ce concept. Cependant, l'effet produit par ces développements ne peut être comparé à la révolution annoncée en 1973 lors de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur les contrats (partie générale) et l'adoption de l'exigence de la bonne foi en ce qui a trait au devoir d'information. Principalement en raison de l'article 12, il peut être dit qu'à l'heure actuelle la loi israélienne sur les contrats établit un principe général de divulgation, de sorte que la règle du caveat emptor se voit complètement abandonnée97.

La jurisprudence israélienne interpréta l'article 12 comme imposant un devoir d'informer l'autre partie de certains types d'informations qui lui sont inconnus. Dans une des premières causes où l'article 12 fut interprété, le juge Asher déclara : « Négocier un contrat de bonne foi signifie mener les négociations avec honnêteté et de façon équitable, c'est-à-dire, sans malmener l'autre partie en ne lui divulguant pas certaines informations qui sont importantes pour lui »98.

Le devoir d'information couvre tout genre d'information qui pourrait servir à l'autre partie au moment de décider s'il va conclure le contrat99, et à quelles conditions. Cela dépendra évidemment de la nature de la transaction, la nature des parties, ainsi que des circonstances de l'affaire, bien qu'il soit souvent réitéré que ce devoir ne porte que sur les « faits matériels » du contrat100. Le devoir s'impose lorsque dans les circonstances on s'attend à ce qu'une partie divulgue des faits inconnus à son vis-à-vis. Il s'en suit alors que la divulgation est requise suite à la demande 69 de l'autre partie et que parfois il appartiendra au détenteur de l'information de prendre l'initiative101.

La jurisprudence israélienne a abordé la question intéressante à savoir si l'obligation d'information couvre aussi des faits dont l'autre partie peut prendre connaissance par lui-même. Dans l'affaire mentionnée ci-dessus de Spector c. Zarfati102, l'acheteur d'un lot de terrain pouvait s'enquérir de la possibilité de construire dans la municipalité. Il n'a pas entrepris une telle enquête car la région lui était familière, et il ne voyait aucune raison pourquoi le lot spécifique serait différent des autres. Deux des juges étaient de l'opinion que le devoir d'information ne doit pas être limité aux faits dont l'autre partie ne peut prendre connaissance. Le juge Landau, par contre, pensa qu'une telle limite devait être imposée. Le Pr Shalev, dont les propos sous-tendent la dissidence du juge Landau, est de l'avis que le débat n'est pas encore résolu103. Il nous semble au contraire qu'il existe suffisamment d'autorité pour appuyer la proposition qu'en vertu des critères oraux que recèle la notion de bonne foi, même les faits dont une partie eut prendre connaissance devront dans certains cas lui être révélés par son vis-à-vis104.

Il faut se rappeler que parfois l'obligation d'information porte sur d'autres domaines que ceux mentionnés dans cet article. Il est proposé, par exemple, que le simple fait pour une partie de mener des négociations parallèles ou d'agir sans intention de conclure un contrat ne constitue pas en soi de la mauvaise foi. Plutôt, il y a manque de bonne foi en cela qu'il n'ait pas divulgué ce fait à son vis-à-vis.

Un autre aspect de l'obligation d'information, à propos de laquelle les tribunaux israéliens n'ont pas encore eu l'opportunité de se prononcer, porte sur l'exigence que tout matériel soit manipulé avec bonne foi lorsqu'il est obtenu par une partie aux négociations. Cette obligation comprend également l'obligation de non-divulgation : il faut garder secret tous les détails ou autres secrets commerciaux révélés dans le cours des négociations. A nos yeux la règle à l'effet qu'une partie doive conserver un degré raisonnable de discrétion constitue une application naturelle et raisonnable du devoir d'agir de bonne foi. Nous croyons que les tribunaux israéliens partageront également notre perspective à ce sujet.

2.1. Négociations parallèles

Il est évident que chacun est libre de choisir avec qui faire affaire et qu'une personne peut simultanément entretenir des relations d'affaires avec plus d'une personne dans le but d'obtenir les meilleurs conditions 70 possibles dans la transaction. La question se pose cependant de savoir jusqu'à quel point une telle conduite cesse d'être légitime et franchit les limites de la bonne foi.

Les cas où la bonne foi des parties se trouve mise en question doivent être évalués en considérant les circonstances de l'affaire. Par exemple, si « une partie aux négociations aurait donné à croire à son cocontractant que des négociations parallèles n'auraient pas lieu »105.

La règle est - comme dans les cas généraux de cessations injustifiées des négociations - que l'étendue du droit de se retirer des négociations (ex. : afin de poursuivre des négociations menées parallèlement avec une autre partie) se voit graduellement limitée en fonction des étapes parcourues par les parties dans leurs négociations. En effet, an peut prétendre que, contrairement aux premières étapes de la négociation d'un contrat, afin de préserver son droit de se retirer, une partie soit dans l'obligation de divulguer à son vis-à-vis l'existence de négociations parallèles, une fois que les dernières tapes de leurs négociations sont entamées. Un manquement à cette obligation pourrait être vu comme une absence de bonne foi, et rendrait injustifiable tout retrait subséquent des négociations. Une telle conclusion pourrait également se fonder directement sur le manquement de la partie à son obligation de divulguer à son vis-à-vis l'existence de négociations parallèles106.

Dans de tels cas, la divulgation de l'existence de négociations fait tout simplement partie des règles du jeu, et vise à protéger les parties contre une poursuite en dommages-intérêts, lorsque la partie adverse présumait à juste titre que la conclusion du contrat était définitivement en vue.

Évidemment, de fausses représentations quant à l'existence de négociations parallèles constituent un manquement au devoir d'agir de bonne foi. Une partie peut également être tenue responsable pour un retrait injustifié des négociations si plusieurs de ses représentants mènent des négociations parallèles avec d'autres parties et que tous excepté un, se retirent à un stade où la rupture des négociations est considérée comme étant sans justification, même si il n'était pas dans leur intention de causer tort à qui que ce soit. Dans ce cas, la responsabilité de la partie en cause est fondée sur son « système interne ». Un manque de bonne foi est également présent lorsqu'une partie négocie la vente d'une propriété qu'il sait être déjà vendue à une autre personne ou lorsqu'il fait une offre irrévocable. Dans cette dernière situation, la décision de conclure le contrat réside entièrement entre les mains des destinataires de l'offre. Il s'ensuit alors qu'il est interdit à celui qui a présenté l'offre d'entamer des négociations avec des parties autres, afin d'éviter que deux transactions contradictoires ne soient conclues.

La Cour suprême a examiné la poursuite de négociations parallèles à la lumière du principe de la bonne foi dans l'affaire État d'Israël c. Ingénieur Faber, Entrepreneurs107. Dans cette affaire, le Gouvernement 71 avait conclu un contrat par le biais d'un appel d'offres avec l'intime, un entrepreneur en construction, afin que ce dernier déplace un immeuble d'un site à un autre. Une fois les travaux entamés, le Gouvernement, se fondant sur une clause du contrat, ordonna à l'entrepreneur de cesser les travaux. Cependant, il fut dévoilé par la suite que le Gouvernement avait conclu un contrat avec un tiers pour la vente de ce même immeuble, en vertu duquel ce dernier demeurerait sur son site original. Cela constituait effectivement le plan du Gouvernement à l'origine, mais après que les premières négociations avec le tiers n'aient pas porté leurs fruits, le Gouvernement s'était vu contraint de négocier avec l'intime. C'est seulement après la signature du contrat avec ce dernier que le Gouvernement parvint enfin à s'accorder avec le tiers. Le juge Or décida que le Gouvernement avait agit de mauvaise foi dans cette affaire. L'obligation du Gouvernement de divulguer l'existence de négociations parallèles aux soumissionnaires au cours des négociations était fondée sur l'influence que pourrait avoir cette information sur la décision de l'entrepreneur. Il fut jugé que la clause dans l'appel d'offre, en vertu de laquelle le Gouvernement s'est retiré du contrat ne devait pas recevoir application, car habituellement une partie au contrat envisage que les probabilités que son contractant y ait recours sont infimes, tandis qu'en l'espèce il existait de grandes chances que le Gouvernement invoquerait son droit de retrait. La Cour décida qu'il appartenait au Gouvernement d'aviser l'entrepreneur de la forte possibilité que la clause soit invoquée. Par ailleurs, il faut noter que la Cour ne condamna pas la poursuite de négociations parallèles, mais plutôt l'omission de divulguer leur existence lors de l'appel d'offre.

A cet égard, il faut également mentionner l'affaire exceptionnelle de Domb c. Domb108. Dans cette affaire, un couple divorcé entreprit d'un commun accord de vendre l'appartement qu'ils détenaient ensemble et de partager entre eux le produit de la vente. Après n'être pas parvenus à obtenir un prix satisfaisant, ils modifièrent leur entente de sorte que le mari vendit sa part à sa femme à un prix assez bas. Par la suite, le mari découvrit que sa femme était parvenu au préalable à un accord avec un tiers, dans le but de lui vendre l'appartement à un très bon prix. Le mari réclama sa part du profit en se basant sur le fait que sa femme avait manqué de l'aviser quant à l'existence d'un acheteur à des conditions favorables. La Cour suprême tint la femme responsable pour son absence de bonne foi, car elle avait mené des négociations avec l'acheteur durant la même période qu'elle négociait avec son mari. Ce dernier avait été privé par la suite de sa part du profit parce que sa femme avait omis de l'aviser des négociations parallèles.

3. Absence de parité dans les offres

Sans l'affaire de Raviv c. Beit Yole109, la Cour suprême a traité de la portée de l'article 12 en ce qui a trait aux appels privés d'offres. La décision de la majorité, donnée sous la plume du juge Barak, fut à 72 l'effet qu'il découle de l'obligation de négocier de bonne foi que tous les soumissionnaires dans le cadre d'un appel privé (ou public) d'offres doivent être traités également. Le requérant, qui figurait parmi les soumissionnaires dans le cadre d'un appel d'offres pour la construction d'une maison de repos, poursuivit le maître de l'ouvrage pour avoir mené des négociations avec seulement un des soumissionnaires, qui par ailleurs n'était même pas un candidat éligible car il ne remplissait pas les critères stipulés dans l'appel d'offres. Le requérant a obtenu gain de cause et s'est vu dédommagé pour les dépenses qu'il avait encourues afin de présenter sa soumission.

L'opinion de la dissidence, présentée par le juge Levin, se vit toutefois sanctionnée lors de l'audition supplémentaire qui fut tenue à propos de cette affaire110. Révoquant la décision originelle, les juges siégeant à l'audition supplémentaire jugèrent que bien que suivant un appel d'offres public les soumissionnaires doivent recevoir un traitement égal, l'article 12 n'impose pas une telle obligation lorsque l'appel d'offres se fait dans le domaine privé. Le vice-président Élon critiqua la décision originelle de la Cour, la caractérisant de paternaliste, et l'accusant d'enfreindre sans justification la liberté contractuelle des parties. D'après lui, l'imposition d'une limite à la liberté contractuelle des parties n'est légitime que dans des circonstances où une partie bénéficie d'un avantage économique ou intellectuel sur son cocontractant. Lorsqu'il s'agit de deux partenaires égaux sur le plan économique, il n'y a aucun lieu d'imposer des critères d'égalité, car cela irait contre les expectatives des parties ainsi que le sens de l'article 12.

Nous sommes entièrement d'accord avec l'avis exprimé par les Prs Friedmann et Cohen, à l'effet que la clef pour déterminer ce qui constitue un manque de bonne foi correspond aux expectatives des parties ; les parties soumissionnant à un appel d'offres sont conscientes du risque qu'elles n'obtiendront pas le contrat, mais tiennent toutefois à ce que la sélection se fasse de bonne foi. Elles n'assument pas le risque que des négociations soient menées parallèlement, car cela viendrait vider le procédé de tout son sens. Il est clair alors qu'en l'espèce, le requérant n'aurait pas entamé les négociations s'il agissait en pleine connaissance de cause. La manipulation d'un appel d'offres afin d'exercer une pression sur une partie à des négociations parallèles dans le but d'obtenir une meilleure offre constituerait alors un acte de mauvaise foi, et serait contraire à l'article 12.

4. Absence de mandat

Un autre cas où la responsabilité précontractuelle d'une partie se voit engagée d'après le droit israélien est lorsque celle-ci agit au nom d'un autre sans avoir obtenu son consentement au préalable. Les origines de cette règle remontent à l'époque où la théorie du culpa in contrahendo était encore à ses débuts - le cas fut considéré par Jhering et suscita l'élaboration de la théorie du falsus procurator111 dans le droit allemand.

73

Il faut dire que cette situation n'a pas encore été abordée de façon explicite dans le droit israélien. Toutefois l'affaire de Pnidar c. Castro112, où des gérants, avocats et autres agents qui n'étaient pas parties au contrat furent tenus responsables sur le plan précontractuel, laisse entendre que les tribunaux n'hésiteraient pas à voir celui qui agit au nom d'un autre sans mandat comme manquant de bonne foi. Il est évidemment possible de s'exonérer de ce genre de responsabilité en avisant son vis-à-vis de l'absence de mandat, et en s'engageant à tenter de l'obtenir dans l'avenir en s'assurant qu'il s'appliquera rétroactivement.

5. Manquement à l'obligation de sauvegarder la personne et la propriété de l'autre partie

Bien que l'on pourrait comprendre l'obligation de sauvegarder la personne comme comportant aussi le devoir de sauvegarder la propriété d'une partie aux négociations, l'étendue de cette dernière obligation se limite au principe de la bonne foi. Cette obligation ne s'applique que dans la mesure où elle d coule directement de l'obligation d'agir de bonne foi (ex. : un produit envoyé a un client dans le cadre d'un test, se trouve être endommagé ou défectueux113).

Il nous semble alors qu'il ne faut pas accepter la théorie allemande, en vertu de laquelle, un lien précontractuel existant entre deux parties suffit pour donner lieu à la responsabilité de la protection physique et matérielle d'une partie envers l'autre aux négociations114. De telles situations se créent par l'établissement de contacts sociaux qui occasionnellement débouchent sur des négociations. Par ailleurs, nous ne pouvons croire que dans de telles situations se forme le genre de relation de dépendance exclusive entre les parties qui sous-tende le principe de la bonne foi, où le sort de la relation peut être déterminé par l'éventualité qu'un dommage soit fait. Tel que nous l'avons déjà mentionné, nous sommes de l'opinion que les situations comme celle examinée par la jurisprudence allemande dans l'affaire du linoleumrollfall doivent trouver leur solution dans le cadre de la responsabilité civile et non dans celui de la responsabilité précontractuelle115.

*Cet article sera publié en deux livraisons, la seconde partie paraîtra dans un numéro suivant de cette Revue (N.D.R.L.).
**Professeur de droit à l'Université hébraïque de Jérusalem, directeur de l'Institut Harry et Michael Sacher pour la recherche législative et le droit comparé.
1Cet article trouve son origine dans l'ouvrage, Le Droit des obligations, publié par l'auteur en hébreu (Jérusalem, 1977). Dans un article précédent, « The Theory Concerning Culpa in Contrahendo Precontractual Liability : From Roman Law to the German Legal System. A Hundred Years After the Death of Jhering », in European Legal Traditions and Israel (éd. A. M. Rabello, Jérusalem 1994, pp. 69 et s.), j'ai fait état des circonstances qui m'ont conduites à republier certaines parties de cet ouvrage en anglais. Bien que la publication de cet article portant sur la théorie de la Culpa in Contrahendo en droit israélien s'inscrive dans l'accomplissement de ce même projet, elle porte également une autre signification, plus importante. En effet, il faut noter d'emblée que lorsque cet ouvrage a vu le jour en 1977, seulement quatre ans s'étaient écoulés depuis la mise en vigueur de la nouvelle loi israélienne sur les contrats. Par conséquent, aucune jurisprudence, ni essai de doctrine n'étaient disponibles pour faire ressortir toute l'ampleur de sa portée révolutionnaire. Il a donc fallu attendre encore plusieurs années avant que le régime juridique israélien ne parvienne à pleinement absorber cette nouvelle pièce de législation. Maintes décisions de jurisprudence, ainsi que les vastes commentaires offerts par la doctrine, contribuèrent tous largement à redresser la situation afin de rendre au droit des contrats israélien toute sa force et sa richesse. Parmi le$ nombreuses dispositions énoncées dans le nouveau texte législatif nous aimerions mettre en lumière l'article 12 (« l'article le plus révolutionnaire dans la nouvelle loi sur les contrats ») qui a instauré dans le droit des contrats israélien le devoir de négocier de bonne foi et de façon conforme à l'usage. Cet article se veut être une étude du processus, tant sur le plan pratique que sur le plan théorique, qui a permis de pleinement dégager le sens de ce devoir dans le régime juridique israélien.
2V. le discours d'ouverture de l'ancien ministre de la Justice concernant le Projet de loi sur les contrats dans 23 Knesset Proceedings, 1970, p. 1761 (en hébreu) : « ... Le Projet de loi que nous déposons aujourd'hui constitue la fondation tant de la Loi sur les contrats que du droit général des obligations. En vérité, il s'agit du premier chapitre du Code civil de l'État... ». Nous ne partageons pas le point de vue que la Loi sur les contrats constituera « le premier chapitre du Code civil de l'État ». A notre avis il formera plutôt le premier chapitre du livre portant sur les obligations dans le futur Code civil israélien. Les lois adoptées jusqu'à ce jour sont comprises dans le Code civil qui est sur le point d'être complété. Ce sont : la Loi sur la capacité juridique et la tutelle, 1962 (16 LSI 106) ; la Loi sur les contrats standardisés, 1964 (18 LSI 51) ; la Loi sur le mandat, 1965 (19 LSI 231) ; la Loi sur les successions, 1967 (19 LSI 58) ; la Loi sur les dépositaires, 1967 (21 LSI 49) ; la Loi sur le cautionnement, 1967 (21 LSI 41) ; la Loi sur les gages, 1967 (21 LSI 44) ; la Loi sur les donations, 1968 (22 LSI 113) ; la Loi sur la vente, 1968 (22 LSI 107) ; la Loi sur les biens immobiliers, 1969 (23 LSI 283) ; la Loi sur la cession de créance, 1969 (23 LSI 277) ; la Loi sur les biens meubles, 1971 (25 LSI 175) ; la Loi sur les contrats (Remèdes pour violation d'un contrat), 1970 (25 LSI 11) ; la Loi sur la location et le prêt, 1971 (25 LSI 152) ; la Loi sur les contrats (partie générale), (27 LSI 117) ; la Loi sur la restitution de biens perdus, 1973 (25 LSI 187) ; la Loi sur les rapports financiers entre époux, 1973 (27 LSI 313) ; la Loi sur les contrats de service, 1974 (28 LSI 15). Les traductions anglaises de toutes ces lois sont regroupées en annexe in A. M. RABELLO (éd.) European Legal Traditions and Israel, Jérusalem, 1994, pp. 589-770. Sur les implications de la codification dans le droit israélien v. A. BARAK, « Towards a Codification of the civil law y» 3 TULR, 1973, pp. 5 et s., et la doctrine qui y est citée ; G. TEDESCHI-I. ENGLARD, « Les problèmes de la codification à la lumière des expériences et situations actuelles » , Israel Reports to the Sixth International Congress of Comparative Law, Jérusalem, 1962, pp. 1 et s. ; S. GINOSSAR, « Caratteri ed orientamenti del diritto israeliano, 29 Rassegna Mensile di Israel, 1973, pp. 152 et s. ; G. TEDESCHI, « On reception and an the Legislative Policy of Israel », 9 Scripta Hierosolymitana, 1966, pp. 11 et s. ; G. TEDESCHI, « On Problems of Reception and our Legal Policy » 15 HaPraklit, 1960, pp. 1 et s. (en hébreu). A propos des nouvelles lois et leurs interprétations, V. G. TEDESCHI (1972) (en hébreu) ; cette compilation comprend actuellement les commentaires suivants:I. ENGLARD, Capacity and Guardianship Law, 1962 (secs. 1-13), Jérusalem, 1972, 2e éd., 1995 (en hébreu) ; Z. ZELTHER; Sales Law, 1968, Jérusalem, 1972 (en hébreu) ; E. ZAMIR, Sales Law, 1968, Jérusalem, 1987 (en hébreu) ; A. M. RABELLO, The Gift Law, 1968, Jérusalem, 1979 ; 2` éd., 1996 (en hébreu) ; M. BEN-PORAT, Transfer of Obligations Law, 1969, Jérusalem, 1972 (en hébreu) ; U. YADIN, Contracts (Remedies for Breach of Contract) Law, 1970, Jérusalem, 1973 (en hébreu) ; A. BARAK, Agency Law, 1965, Jérusalem, 1975, 2e éd., 1996 (en hébreu) ; E. ZAMIR, Contract for Services Law, 1974 Jérusalem, 1994 (en hébreu) ; Sh. RENER, Bailees Law, 1967 (à paraître) (en hébreu). V. également Z. ZELTNEID, « The Development of the Laws of Contract in Israel during a quarter of a century since the establishment of the state » , 29 HaPraklit, 1974, pp. 56 et s. (en hébreu) ; V. aussi les échanges dans « The Symposium an the Codification of the Civil Law », 3 Tel-Aviv University LR., 1974 (en hébreu) ; v. aussi les articles suivants qui y sont inclus : U. YADIN, « The Succession Law as part of the Israeli Civil Legislation » ., pp. 26 et s. (en hébreu) ; Z. ZELTHER, « Reflections on the Contracts (General Part) Bill 5730-1970 » , pp. 131 et s. (en hébreu) ; D. FRIEDMANN, « Remedies for Breach of Contract », pp. 134 et s. (en hébreu) ; G. TEDESCHI, « The Contracts (General Part) Bill and its Limits », 3 Mishpatim, 1'971, pp. 105 et s. (en hébreu) ; v. aussi G. PROCACCIA, Law of Agency 5735-1965, vol., 1, Tel-Aviv, 1975 (en hébreu) ; U. YADIN, « The New Statute Law of Contracts », 9 ISLR, 1974, pp. 512 et s. ; D. FRIEDMANN, « The Effect of Foreign Law an the Law of Israel: Remnants of the Ottoman Period », 10 ISRL, 1975, pp. 192 et s. ; D. FRIEDMANN, « The Provision Regarding Autarky of the Law and the Problem of Lacunae in Modern Israeli Legislation » , 5 Mishpatim, 1974, pp. 91 et s. (en hébreu), et la réplique de A. BARAK, « Comment an "The Provision Regarding Autarky of the Law and the Problem of the Lacunae in Modern Israeli Legislation" », 5 Mishpatim, 1974, pp. 99 et s. (en hébreu) ; G: TEDESCHI, « On the Labor Contract Bill. 5738-1968 », 6 Mishpatim, 1975, pp. 163 et s. (en hébreu) ; au sujet de l'interprétation des lois v. A. BARAK, Interpretation in Law, Jérusalem, 1992-1994, 3 vols. (en hébreu) et Judicial Discretion, New Haven, 1989.
3V. Z. ZELTHER, op. cit., p. 12 ; A. BARAK, op. cit., p. 23, « The Codification of the Civil Law in Israel and the Judiciary » ; I. ENGLARD, « 25 years of the Civil Wrongs Ordinance » , 5 Mishpatim, 1974, p. 591, nt. 178 (en hébreu) : « ... Nous croyons que la casuistique caractéristique du mode de raisonnement dans le droit anglo-américain est plus facile et plus aisée qu'un mode dé raisonnement à partir duquel an arrive à des conclusions par le biais de déductions logiques et conceptuelles. Indubitablement ce dernier mode exige une capacité d'abstraction et une grande discipline mentale... ».
4Pour des commentaires sur la nouvelle législation, v. G. TEDESCHI, On the techniques in the future Israeli Legislation, 1958, 2, pp. 58 et s. (en hébreu) ; U. YADIN, « On the Interpretation of the Laws of the Knesset » , 13 HaPraklit, pp. 305 et s. (en hébreu) ; U. YADIN, « More an the Interpretation of the Laws of the Knesset », in 50th Year commemoration of Pinhas Rosen, 1972, p . 125 et s. (en hébreu) ; U. YADIN, « Again an the Interpretation of the Laws of the Knesset », HaPraklit, 1970, pp. 190 et s. (en hébreu) ; U. YADIN, « Succession Law » , 3 Tel-Aviv University L.R., 1973, pp. 29 et s. (en hébreu) ; I. SHILOH, « Succession Law » , 3 Tel-Aviv University L. R., 1973, pp. 34 et s. (en hébreu) ; G. PROCAC-CIA, « Principles of Interpretation of Israeli Law and Particularly of the Law of Contracts with Reference to English Law», 3 Tel-Aviv University L. R., 1973, pp. 112 et s. (en hébreu) ; Z. ZELTNER, op. cit., p. 12 ; ',Y. WEISSMAN, op. cit., pp. 5 et s. ; A. BARAK, op. cit., pp. 23 et s. ; G. TEDESCHI Insufficiency of the Legal Norm and Loyalty of the Interpreter, Jérusalem, 1964 (en hébreu) ; A. BARAK, Judicial Discretion, New Haven, 1989.
5V. WARHAFTIG, Law of Contracts in Jewish Law, Jérusalem, 1974 (en hébreu) ; M. ELON, « Contract », 3 Enc. Judaica, Jérusalem, 1971, p. 923 et s. ; v. aussi les remarques du Ministre SHAPIRA, dans 34 Knesset Proceedings, 1970, p. 2872: « Au cours du débat, l'argument selon lequel nous avions amoindri l'apport du droit juif traditionnel fut réfuté. Dans la Loi sur les contrats (Partie générale), peu de choses ont été tirées du droit juif traditionnel, bien que nous ayons emprunté la notion de Zachin L'Adam Sh'Lo B'Fanav [la présomption qu'une offre faite exclusivement au destinataire est acceptée par ce dernier]. Cela tient à la nature du droit juif traditionnel. Le droit juif traditionnel est un droit empirique qui traite de sujets concrets, et non abstraits. Dans une grande mesure, il ressemble au droit anglais (la Common Law britannique); en ce qu'il est formé de questions et de réponses qui surviennent dans le cours de la vie. En général, le droit juif traditionnel n'établit pas de principes légaux abstraits, bien qu'à ce titre il faille admettre certaines exceptions. Il s'en suit alors que le chapitre [de la loi] formant le sujet de notre débat, de par sa nature abstraite, n'est pas tiré du droit juif traditionnel. On peut toutefois se demander si le droit juif traditionnel ne servirait qu'à des fins traditionnelles ou est-ce que sa contribution ne se manifesterait pas sur un plan plus concret. V., par exemple, à propos de la règle « le mandataire d'un homme est comme ce dernier » (Talmud Babylonien ; Kidushir, 41(b), A. BARAK, op. cit., 1965, p. 87 ; dans la même veine, v. Z. ZELTNER, op. cit., 1972, p. 16, et G. PROCACCIA, op. cit., 1975, pp. 49 et s. ; ce n'est pas l'objet de la présente étude de traiter de ce sujet. Cependant nous nous bornerons à évoquer notre espoir que le législateur israélien trouvera un moyen approprié pour intégrer le droit juif traditionnel ainsi que le réinstaller, dans toute sa splendeur originelle.
6G. TEDESCHI, « On Reception and Policy an the Legislative of Israel », 16 Scripta Hierosolymitana, 1966, 11, 49.
7Pour un aperçu de ce problème dans le droit continental v. S. VAN ERP, « The Formation of Contracts » , dans A. S. HARTKAMP et alii (éd.), Towards a European Civil Code, Dordrecht, 1994, pp. 117 et s.
8Il est bien connu que selon le régime juridique anglais il est interdit de se référer aux travaux préparatoires, c'est-à-dire à l'ensemble des textes pertinents à l'élaboration de la loi, afin de dégager l'intention du législateur. Tel n'est pas le cas dans les systèmes de droit continentaux où il est parfaitement acceptable d'entreprendre un examen de ce genre. L'approche continentale nous semble être la meilleure. V. SHILOH, « Succession Law », 3 Tel-Aviv University LR., 1973, p. 50 (en hébreu). Pour ce qui est de notre sujet, il y a lieu de se référer aux débats de la Knesset qui portent explicitement sur l'intégration du principe de culpa in contrahendo dans le droit israélien. La législature fut parfaitement consciente de l'importance ainsi que de la portée d'un tel changement, et certains législateurs mirent en question la nécessité de la responsabilité précontractuelle. Le procès-verbal révèle également que la distinction entre le dolus bonus et le dolus malus a échappé à certains, bien que la distinction fut déjà soulignée par les juristes romains. V. A. BERGER, Encyclopedic Dictionary of Roman Law, Philadelphie 1953, pp. 440-441.
9Il n'est pas inutile de rapporter le texte de la disposition telle qu'elle fut formulée dans le Projet de loi : (a) Une personne est tenue de négocier de bonne foi et de façon conforme à l'usage à toutes les étapes de la préparation et de la rédaction du contrat. (b) Une partie ne remplissant pas cette obligation sera responsable pour le dédommagement de l'autre partie pour les dommages qui lui sont causés suite à son entrée dans les négociations ou à la conclusion du contrat, et les dispositions concernant la compensation pour violation contractuelle recevront application avec les changements nécessaires selon cette disposition ». Sur la signification que revêtent les changements apportés au langage de l'art. 12 du Projet de loi, v. G. SHALEV, Exemption Clauses, Jérusalem, 1974, pp. 177 et nt. 36 (en hébreu). V. aussi G. SHALEV, « Article 12 of the Contracts Law : Good Faith in Negotiation » , 7 Mishpatim, 1976, 118 (en hébreu).
10V. WEISMAN, op. cit., 1975, pp. 343.
111 LSI 17, 49. V. A. BARAK, The Nature of the Negotiable Instrument, Jérusalem, pp. 125 et s. (en hébreu) ; A. BARAK, « Stolen short-term Loan Bonds ; The Rights of a Bona-fide Purchase for Value » , 5 Mishpatim, 1973, pp. 160 et s. (en hébreu) ; v. aussi Y. ZUSSMAN, The Law of Bills of Exchange, 4e éd., pp. 277-278 (en hébreu).
12A. BARAK, The Nature of the Negotiable Instrument, supra, nt. 11, pp. 125-126.
13A propos du principe de « Market Overt » dans le droit juif traditionnel, v. Jewish and Roman Law, New York, B. COHEN, 1960, pp. 620 et s. ; M. ELON, Jewish Law. History, Sources, Principles, Jérusalem, 1973, pp. 490 et s. ; S. ALBECK, « Theft and Robbery », 15 Judaica col. 1097. Pour d'autres aspect du principe de « Market Overt » dans le droit israélien, v. Y. WEISSMAN, op. cit., 1975 ; aux pages 154 et s. l'auteur traite de l'exigence de bonne foi ; à la note 3, p. 155, il aborde la distinction faite entre la position de l'acheteur et celle de celui qui reçoit un gage.
14Concernant cette disposition v. A. BARAK, The Nature of the Negotiable Instrument (supra, nt. 11), pp. 126 et s. ; Z. ZELTNER, op. cit., 1968, pp. 145 et s. ; E. ZAMIR, Sale Law, 1968, Commentary on Laws Relating to Contracts (éd. G. TEDESCHI), Jérusalem, 1987, pp. 677-717 (en hébreu).
15Article 62(b) de la Loi anglaise de 1893 sur la vente de biens.
16932(2) - Der Erwerber ist nicht in gutem Glauben, wenn ihm bekannt oder infolge grober Fahrlässigkeit unbekannt ist, das die Sache nicht dem Veräußerer gehört.
17Von TUHR, Der allgemeine Teil des BGB, Munich et Leipzig, 1914, vol. 2, p. 134, nt. 63 ; vol. 3, pp. 20, 296, 304. La notion de Treu und Glaube apparaît à l'article 242 du BGB , infra. A ce sujet v. aussi, LEHMANN, Allgemeiner Teil des BGB, Berlin, 1952, , pp. 95 et s. ; ENNECCERUS-LEHMANN, Schuldrecht, Tübingen, 1958, pp. 17 et s. ; LARENZ, Lehrbuch des Schuldrechts, vol. I, Munich, 19,58, pp. 88 et s.; WAECHTER, Die « bona fides » insbeson-dere bei der Ersitzung des Eigentums, Leipzig, 1871 ; BRUNS, Das Wesen der « bona fides » insbesondere bei der Ersitzung, Berlin, 1872 ; STEINBACH, Treu und Glauben im Verkehr, 1900 ; SCHNEIDER, Treu und Glauben im Recht der Schuldverhältnisse, 1902 ; HENLE, Treu und Glauben im Verkehr, 1912 ; HAMBURGER, Treu und Glauben, Mannheim, 1930 ; HUECK, Der Treugedanke im modernen Privatrecht, 1947 ; BEITZKE, in Monatsschrift fur Deutsches Rechts, 1953, pp. I et s. ; A. M. RABELLO, « The Theory Concerning Culpa in Contrahendo »(Precontractual Liability). Op. cit. nt. 1, pp. 69 et s., pp. 139-154 ; v. aussi F. KESSLER et E. FINE, « Culpa in contrahendo, bargaining in good faith and freedom on contract : a comparative study », Harvard Law Review, 77, 1964, pp. 401 et s.
18The Digest of Justinian, vol. 4, Philadelphie, University of Pensylvania Press, 1985 (trad. anglaise par A. WATSON).
19Ibid.
20ZELTNER, op. cit., 1968, p. 147 ; BARAK, The Nature of the Negotiable Instrument (supra, nt. 8). La règle établie par la jurisprudence israélienne fut expliquée par Eyal ZAMIR dans son commentaire concernant la Loi israélienne sur la vente, pp. 703-704 : « En Israël, la règle est que le test est de nature subjective, et non objective. « La règle est que la bonne foi et la négligence peuvent coexister » (Le juge C. COHEN dans Shitrit c. Car Tours, 1979, 33(1), 331, 333). Cette règle est fermement ancrée dans le texte de la loi, dans des règles analogues ou parallèles tirées de notre système légal, et dans des considérations qui relèvent de l'ordre de la politique légale... Certains auteurs ont proposé que notre loi adopte la ligne intermédiaire, selon laquelle seule une négligence grossière (et non la négligence simple) nierait la bonne foi. Cette approche ne fut pas acceptée par la jurisprudence, et en l'absence d'un point d'appui dans la loi, il est difficile de la fonder dans notre régime juridique ». Au sujet du fardeau de la preuve v. ZELTNER (p. 148) et E. ZAMIR (pp. 708-709).
21V. ZELTNER, op. cit., 1968, pp. 35 et s., qui fait une comparaison avec le droit allemand et le droit français. V. l'étude de l'article 39 de la Loi sur les contrats et le principe de la bonne foi dans l'article de G. TEDESCHI, « Frustration of Purpose » 10 ISLR, 1975, pp. 1 et s. (sp. pp. 4;8 et s.) : « Parmi les règles résiduaires on trouve certaines règles qui se rapportent au principe de la bonne foi et qui se trouvent dans des lois ayant trait aux contrats, et de façon générale dans la Loi sur les contrats (partie générale). Une interprétation raisonnable de l'article 39 ne devrait pas la considérer comme une panacée qui rendrait superflue tous les autres remèdes disponibles dans ce domaine ; ... » (p. 50). Concernant l'article 6 de la Loi sur la vente, v. la décision du juge KISTER dans l'affaire Lot 677 dans la région 6133 Ltee c. Arieh COHEN, 1975, 29(i) P.D. 365. Le juge KISTER remarque avec raison : « Un aspect concerne l'exécution du contrat par le débiteur lorsqu'il lui incombe de l'exécuter de bonne foi et de façon conforme à l'usage. Le législateur ne peut avoir fait référence à l'usage commun entre fourvoyeurs. L'intention fut plutôt que le débiteur agisse de façon conforme à l'usage dans une négociation équitable ». V. aussi une interprétation recherchée de Part. 6 in E. ZAMIR, Sale Law, pp. 160-175.
22Der Schuldner ist verpflichtet, die Leistung so zu bewirken, wie Treu und Glauben mit Rücksicht auf die Verkehrssitte es erfordern. V. aussi ZELTHER, op. cit., 1974, pp. 27 et s. ; Von THUR, Der allgemeine Teil des BGB, Munich et Leipzig, 1914 ; (Beck'sche Kurz-Kommentare), PALANDT,, Bürgerliches Gesetzbuch, Munich, 1974, pp. 201-211. V. aussi la doctrine citée à la note [14 - Von THUR], et ZELTHER, op. cit., 1974, pp. 220 et s., ainsi que G. TEDESCHI, « Frustration of Purpose », 10 ISLR, 1975, p. 49.
23Les conventions... doivent être exécutées de bonne foi. V. aussi l'art. 1135 ; J. CAR-BONNIER, Droit civil, vol. 4, Paris, 1972, pp. 171 et s., qui comprend un survol des différences entre la jurisprudence anglaise et la jurisprudence française.
24Il contratto deve essere eseguito secondo buono fede. Au sujet de cette disposition v. F. SANTORO-PASSARELLI, Dottrine generali del Diritto Civile, Naples, 1959, pp. 224 et s. ; S. RODOTA, « Il principio di correttezza e la vigenza dell'art. 1175 C.C. » , vol. 1, Banca e Borsa, 1965, pp. 149 et s. ; MESSINEO, op. cit., 1972, pp. 108 et s. ; RABELLO, in Aequitas and Equity, Jérusalem, 1997, p. 463 et s.
25G. SHALEV, Exemption Clauses, Jérusalem, 1974, pp. 174 et s. (en hébreu). Les notes de bas de page qui suivent sont de SHALEV (26-31).
26Cf. 103-2(1) (b) de l'UCC, qui l'élargit la définition de la bonne foi en ce qui a trait aux commerçants, de façon à inclure « fair business practices ». Dans le droit israélien une telle expansion fut réalisée en ajoutant l'exigence « de façon conforme à l'usage ». V. les articles de la loi mentionnés ci-dessus.
27On peut prétendre qu'il existe une corrélation entre l'exigence de la bonne foi et l'exigence de conformité à l'usage. D'un côté, lorsqu'il y a opposition entre la bonne foi et l'usage, une personne ne remplit pas son obligation selon l'article 12(a) si sa conduite ne remplit qu'une des deux obligations, étant donné que l'article 12(a) comporte deux volets. D'un autre côté, le dédommagement offert dans le cadre de l'article 12(b) pour la violation de l'obligation établi à ce dernier article, ne sera pas exigé à moins qu'il y ait violation des deux volets (l'article 12(b) dispose que seule une personne qui « n'a pas agit de bonne foi et de façon conforme à l'usage » doit verser une compensation). Aussi il pourrait survenir une situation où une partie n'ayant pas remplie son obligation selon l'article 12(a) ne sera pas tenue de dédommager selon l'art. 12(b).
28C'est ainsi que le principe fut interprété en France. V. POWELL, « Good Faith in Contracts », 9 Current Legal Problems, 1956, pp. 1, 16.
29Cf. la définition de « bonne foi » dans le dictionnaire de Evan SHOSHAN (en hébreu) : « avec équité, et de pleine intégrité ». Dans les dictionnaires non-hébraïques, il y a aussi une tendance à définir la bonne foi en termes d'équité. V. Bouvier's Law Dictionary 8e éd., Kansas City, 1914 ; Stroud's Judicial Dictionary, 4e éd., éd. Londres, 1971-73 ; JOWITT, The Dictionary of English Law, Londres, 1959.
30Cf. ZELTNER, op. cit., 1972, p. 36.
31V. ZELTNER, op. cit., 1974, pp. 28-30.
32A. M. RABELLO, op. cit., 1977, et nt. 1 ; et, récemment 1994, pp. 69 et s.
33BERGER, op. cit., 1953, p. 374 ; v. aussi G. GROSSO, « Buona Fede (premesse romanistiche) » , 5 EdD, 1959, pp. 661 et s. ; L. FASCIONE, « Cenni bibliografici sulla bona fides », in Studi Sulla Buona Fede, Milan, 1975, pp. 51 et s.
34Au sujet de la bonne foi dans le droit canon v. L. SCAVO LOMBARDO, « Buona Fede : La tradizione canonista » ,, 5 EdD, 1959, pp. 664 et s. ; F. CLAYES-BOUUAERT, « Bonne foi », Dictionnaire de Droit canonique, Paris, 2, 1937, col. 955 et s. ; R. POWELL, « Good Faith in Contracts » , 9 Current Legal Problems, 1956, p. 21.
35Sur les influences réciproques entre le droit et la moralité v. F. BATTAGLIA, Corso di Filosofia del Diritto : Il concetto del Diritto, vol. 2, Rome, 1957, pp. 275 et s. (avec bibliographie).
36F. MESSINEO, Manuale di diritto civile e commerciale, vol. 1, Milan, 1957, pp. 249 et s. ; vol. III, Milan, 1959, pp. 27 et s. ; E. BETTI, Teoria generale delle obbligazioni, vol. 1, Milan, 1953, pp. 65 et s. ; F. CARNELUTTI, Teoria generale del diritto, Rome, 1951, pp. 260, 266, 271, 274 ; DEMOGUE, Traité des obligations, Paris, 1923-25 ; PLANIOL et RIPERT, Traité pratique de droit civil français, Paris, 1931 ; COLIN, CAPITANT et DE LA MORANDIÈRE, Cours élémentaire de droit civil français, Paris, 1957 ; A. MONTEL, « Buona fede », 2 NNDI, 1958, ,pp. 598 et s. ; S. ROMANO, « Buona fede », 5 EdD, 1959, pp. 677 et s. ; D. CORRADINI, Il criterio della buona fede e la scienza del diritto privato - Dal codice napoleonico al codice civile italiano del 1942, Milan, 1970.
37Sur le simulatio, v. BERGER, op. cit., 1953, p. 708 ; G. PUGLIESE, La simulazione nei rapporti giuridici, Padoue, 1938 ; F. SANTORO-PASSARELLI, op. cit., 1966, pp. 149 et s. ; F. MESSINEO, op. cit., 1972, pp. 433 et s. (avec Bibliographie) ; G. PUGLIESE, « Simulazione (Diritto romano) », 17 NNDI, 1970, pp. 351 et s. ; N. DISTASO, « Simulazione dei negozi giuridici » , 17 NNDl, 1970, pp. 359-422 (avec bibliographie de même qu'un survol comparatif). L'article 13 de la Loi sur les contrats (partie générale) se lit comme suit : « Un contrat conclu rien qu'en apparence est nul. Cette disposition n'affecte pas les droits acquis par un tiers qui bona fide s'est fié au contrat ». Concernant cette disposition, v. SHALEV, op. cit., 1995, pp. 165-179 ; ZELTNER, op. cit., 1974, pp. 189 et s. On trouvera un survol d'ordre général dans S. GINOSSAR, Liberté contractuelle et respect des droits des tiers. ; Émergence du délit civil de fraude, Paris, 1963 ; V. aussi S. ROMANO, « Buona fede e simulazione » , 19 EdD, pp. 694 et s.
38Rot c. Yeshupe, 1979, 33 (I), P.D. 617.
39Ibid., p. 635.
40Ibid., p. 636.
41Raviv c. Beit Yoles, 1983, 37(i), P.D. 533, 543.
42Beit Yoles c. Raviv, 1989, 43(i), P.D. 441, 484. Le juge Asher voit l'article 12 comme un moyen d' « ... assurer le plus haut niveau possible de moralité dans les affaires... » dans l'affaire de Spector c. Zarfati, 1918, 32(i), P.D. 231, 238.
43Note de bas de page de SHALEV, Le juge BARAK dans Services de transport Beer Sheva c. Tribunal de travail, 1981, 35(i), P.D. 828, 834. V. note 65, infra.
44SHALEV, op. cit., 1995 et SHALEV, in Israeli Reports to the XIIIth International Congress of Comparative Law, Jérusalem, 1990, 15-17.
45FRIEDMANN-COHEN, op. cit., 1991, 515.
46Il debitore e il creditore devono comportarsi secondo le regole della correttezza. V. CARUSI, « Correttezza », l0 EdD, 1962, pp. 709 et s.
47A ce sujet, v. L. LOMBARDI, Dalla fades alla bona fides, Milan, 1961 ; H. HAUS-MANINGER, Die bona fides des Ersitzungsbesitzers im klassischen Römischen Recht, Munich, 1963; H. HONSELL, « Quod interest im bonae-fidei-iudicium », Studien zum Römischen Schadenseratzrecht; Munich, 1969 ; R. POWELL, « Good Faith in Contracts », 9 Current Legal Problems, 1956, pp. 16 et s.
48F. SCHULZ, Principles of Roman Law, Oxford, 1936, traduit par M. WOLFF.
49Tel doit forcément être le cas. Le terme fides ne pouvait avoir un sens neutre, tel que valetudo ou venenum, puisqu'un temple fut érigé dans la Capitale pour Fides (Pernice, Labeo, ii I, p. 162) ; mala fides, tout comme Graeca fides ou Punica fides constitue une négation du fides (note de SCHULZ).
50BENATTI, op. cit., 1963, pp. 47 et s., pp. 133 et s. ; S. ROMANO, « Buona fede », 5 EdD, 1959, pp. 677 et s.
51BETTI, op. cit., vol. 1, 1953, pp. 81 et s.
52A. COX, « The Duty to in Bargain in Good Faith », 71 Harvard Law Review, 1958, pp. 1401 et s. ; R. POWELL, « Good Faith in Contracts », 9 Current Legal Problems, 1956, pp. 22 et s. « English Law ».
53V. aussi le commentaire, ibid. Au sujet de l'UCC et l'importance que ce dernier revêt dans le droit américain, particulièrement pour ce qui a trait à la bonne foi, v. S. SCHLESINGER, The Uniform Commercial Code in the Light of Comparative Law, New York Legislative-Document, 1955, nº 65 (A), pp. 57 et s. ; S. EZER, Uniform Commercial Code Bibliography, Philadelphie, 1967 ; W. GRAY, « Civil Law and Commercial Law in the United States », in M. ROTONlhI, Inchieste di Diritto Comparato, 3, L'Unità del Diritto delle Obbligazioni, Padoue, 1974, pp. 151 et s. ; B. H. GREENE, « Commercial Law in the United States », in M. ROTONDI, Inchieste, cit., pp. 159 et s. V. aussi E. A. FARNSWORTH, « Good Faith Performance and Commercial Reasonableness under the Uniform Commercial Code », 30 U. Chi. Law Rev., 1963, p. 666.
54A. ANDERSON, Uniform Commercial Code, vol. 1, New York, 1961 ; C. BUNN, H. SNEAD, R. SPEIDEL, An Introduction to the Uniform Commercial Code, Charlottesville, 1964 ; A. BARAK, « The Uniform Commercial Code. Commercial Paper. An Outsider's View » , 3 ISLR, 1968, pp. 7 et s. et pp. 184 et s. Sur les difficultés relatives à la signification de la bonne foi dans l'UCC, ainsi que sur la distinction entre la bonne foi subjective et objective, v. C. BUNN, pp. 252 et s. (favorisant un critère de bonne foi objectif) ; A. BARAK, op. cit., pp. 33-36. Concernant les difficultés particulières qui surviennent dans le droit commercial israélien v. l'étude compréhensive, avec bibliographie, S. GINOSSAR, « Particularisme et particularités du Droit commercial israélien », in M. ROTONDI, Inchieste di Diritto Comparato, cit., pp. 113 et s.
55D. EBAN, « Culpa in contrahendo » , 1 Tel-Aviv University L.R., 1972, p. 343 (en hébreu).
56V. supra, nt. 25, avec une citation du dictionnaire de Evan SHOSHAN. ZELTNER, op. cit., 1974, ignore le problème.
57RABELLO, op. cit., nt. 1. V. le Code civil italien. V. aussi la définition de bonne foi donnée par R. BARRAINE, Dictionnaire de droit : Bonne foi : « Croyance erronée en la légitimité d'un droit ou d'une Situation appuyée sur un titre invalide ». Dans le dictionnaire il n'y a aucune mention de la bonne foi objective, mais tel que nous l'avons déjà souligné « qui buona fede non sta ad indicare una condizione soggettiva della coscienza delle parti, bensi una modalita oggettiva del loro comportamento... reciproca lealta » . V. aussi A. TRABUCCHI, op. cit., 1960, pp. 499 et s. ; R. POWELL, « Good Faith in Contracts » , 9 Current Legal Problems, 1956, pp. 23 et s. ; J. F. BURROWS, « Contractual Co-operation and the Implied Term » , 31 Modern LR., :1968, pp. 390 et s.
58G. BRANCA, Instituzioni di Diritto Privato, 4º, Bologne, 1956, pp. 445 et s.; R. SCO-GNAMIGLIO, op. cit., 1968, p. 212.
59Lorsque cet article a été originellement publié, nous étions de l'opinion que le droit israélien devait adopter un critère objectif de la bonne foi. G. SHALEV, par contre, défendait la doctrine subjective. Toutefois, dans son nouveau livre sur le droit israélien des contrats, Contracts Law, p. 46, elle rappelle la jurisprudence de la Cour suprême et ne fait référence au critère subjectif que dans une note de bas de page.
60La Compagnie du lot no 677 c. Arie Cohen, 1975, 29(i), P.D. 365, 369.
61Kot c. L'organisation des Locataires, 1977, 31(iii), P.D. 813, at 818.
62Spector c. Zarfati, 1978, 32(i), P.D. 231. V. aussi supra, nt. 42 ; infra, nt. 102.
63Ibid., 241.
64Ibid., 244.
65Services de Transport Beer Sheva c. Tribunal de travail, supra nt. 43.
66Ibid., 835.
67Raviv. c. Beit Yoles, 1983, 37(i), P.D. 533.
68Ibid., 544.
69Pnidar c. Castro, 1983 37(iv), P.D. 376, 689
70FRIEDMANN-COHEN, op. cit., 1991, p. 556.
71Un point de vue semblable fut exprimé par G. PROCACCIA, op. cit., 1980, p. 59.
72Cf. ENNECCERUS-NIP ERDEY, Allg. Teil des bürgerlichen Rechts, 15e éd. Tübingen, 1959, p. 863 ; F. SANTORQ-PASSARELLI, « Atto giuridico » , IV EdD, 1959, p. 213. V. le Code civil italien, art. 811 et art. 2045, de même que G. TEDESCHI, « Legittima difesa, stato di necessità e compensazione delle colpe. Appunti critici sul progetto italo-francese delle obligazioni » , 29 Riv. Dir. Commerciale e Dir. Gen. Obbl., 1931, pp. 3 et s.
73A. DE CUPIS, Contributo alla teoria del risarcimeto del danno, Milan, 1969, pp. 26 et s.
74Il ne nous semble pas impératif, tel que le propose SCOGNAMIGLIO, 1968, p. 209, que dans tout cas de cessation de négociations, la partie qui y met fin soit tenue de dédommager son vis-à-vis pour tout dommage subi par ce dernier du fait qu'il s'est fié aux négociations. En effet, nous avons vu que la situation financière de l'autre partie constitue une raison justifiable pour mettre fin aux négociations. Doit-on exiger dans un tel cas que la partie qui se retire des négociations verse une compensation à son vis-à-vis ? Nous pressentons que l'auteur a délibérément poussé son analyse ad absurdum dans le but de la rejeter pour ensuite proposer une théorie alternative.
75SCOGNAMIGLIO, op. cit. , 1968, p. 210.
76Il semble que le M. K. . HAUSNER ait adopté une approche semblable, 28 Knesset Proceedings, 1970, g. 1983. En examinant le rapport de HONDIUS (Precontractual Liability. Reports to the XIIIth International Congress of Comparative Law, Montréal 18-24 august 1990) nous découvrons que la question de la cessation de négociations forme une partie intégrale de la responsabilité précontractuelle, au point que dans certaines juridictions le législateur y a explicitement fait référence : v. le droit yougoslave ainsi que le projet de la Commission Lando sur les principes des contrats commerciaux internationaux, p. 9.
77L'article 3(a) de la Loi sur les contrats prévoit : « Celui qui fait une offre peut la retirer en en donnant avis au destinataire, pourvu que l'avis lui soit livré avant que son acceptation ne soit donnée » . Pour une interprétation de cette disposition v. ZELTNER, op. cit., 1974, pp. 59 et s. « Withdrawal of Offer » . A la p. 62 l'auteur prétend « qu'il était tout à fait naturel de permettre à celui qui fait une offre de la retirer pour autant que le contrat n'ait pas encore été conclu. En effet, dans notre droit un contrat n'est formé que lors de la réception de l'acceptation par celui qui a fait l'offre ». De la même façon, selon le droit italien, une offre peut être retirée pour autant que le contrat n'ait pas encore été conclu. Cependant, les intérêts du destinataire se voient également protégés. L'article 1328 prévoit : La révocation d'une offre et l'acceptation. Une offre peut être révoquée jusqu'à la conclusion du contrat. Cependant, si le destinataire a entrepris de bonne foi l'exécution du contrat avant d'avoir pris connaissance de la révocation, celui qui a fait l'offre est tenu de l'indemniser pour les dépenses et pertes encourues en commençant l'exécution du contrat. L'acceptation peut être révoquée, pourvu que celui qu a fait l'offre en prenne connaissance (de la révocation) avant l'acceptation. V. aussi P. . DOTTORE, « In tema di revoca della proposta contrat-tuale » , Rivista di Diritto Civile, 18, 1972, pp. 379 et s.
78F. SANTORO-PASSAR LLI, Dottrine generali del diritto civile italiano, 9e éd., Naples, 1966, p. 209 ; MESSI O, op. cit., 1968, p. 295 ; OSTI, « Contratto », 4 NNDI, 1959, p. 515 ; R. SCOGNAMI LIO, op. cit., 1968, pp. 86 et s.
79SHALEV, Reports, 20.
80FRIEDMANN-COHEN, op. cit., 1991, 588. Toutefois, les auteurs sont de l'opinion que le droit de se retirer des négociations peut être exercé pour n'importe quelle raison. Cependant, ce droit se voit graduellement limité parallèlement au progrès que prennent les négociations. Le retrait des négociations sera considéré comme étant de mauvaise foi si cela se fait sans justification et que l'autre partie ait pressenti que le contrat serait très probablement conclu.
81S.G.P. Investissements Ltee. c. L'État d'Israël, 1985, 39(ii), P.D. 463, 467, rappelé par les Pr FRIEDMANN et COHEN, ibid., p. 591.
82Shikun Ovdim c. Japnik , 1983, 37(i), P.D. 579.
83V. FRIEDMANN-COHEN, op. cit., 1991, p. 595: Ils prétendent aussi que le retrait d'une offre irrévocable est interdit, et que cela peut être considéré comme un manque de bonne foi.
84Principles of International Commercial Contracts, Rome, Publications of Unidroit, 1994, pp. 50 et s. avec commentaire. A. S. HARTKAMP, « The Concept of Good Faith in the Unidroit Principles for International Commercial Contracts », 3 Tulane Journal of International and Comparative Law, 1994, pp. 65 et s. ; M. J. BONELL, Un « Codice » Internazionale del Diritto dei Contratti. I Principi Unidroit Dei Contratti Commerciali Internazionali, Milan, 1995, p . 98 et s.
85SHALEV, op. cit., 1990,150, Reports 20. A. S. HARTKAMP, The Unidroit Principles for International Commercial Contracts and the New Dutch Civil Code, Deventer, 1994, pp. 127 et s. ; M. J. BONELL, Un « Codice » Internazionale del Diritto dei Contratti, op. cit. (supra, nt. 84), pp. 98 et s., 109 et s.
86Dar c. Le Comité des Soumissions de la Municipalité de Kiryat-Bialik, 1984, 38(ii), P.D. 85. Cette affaire portait sur un contrat gouvernemental, mais donna une interprétation générale à l'article 12 de la Loi sur les contrats.
87Ibid., p. 87.
88FRIEDMANN-COHEN, op. cit., 1991, 597.
89Sonnensten c. Gabasso, 1988, 42(ii), P.D. 278 ; v. infra, nt. 91.
90G. SHALEV, « Preliminary Agreement and Good Faith », 19 Mishpatim, 1990, 457 (en hébreu). V. aussi E. A. FA NSWORTH, « Precontractual Liability and Preliminary Agreements : Fair Dealing and Failed Negotiations », 87 Columbia Law Review, 1987, pp. 217 et s.
91Sonnenstain c. Gabasso,1988, 42(ii), P.D. 278, 287.
92SHALEV, op. cit., 19 , 52, Reports 21.
93FRIEDMANN-COHE op. cit., 1991, 598.
94FRIEDMANN-COHEN , op. cit., 1991, 613.
95FRIEDMANN-COHEN, op. cit., 1991, pp. 610-613; nous abordons ce problème, infra.
96SHALEV, Reports 21.
97V. Kaplan c. Novogeozky, 1984, 38(iii), P.D. 477, 484.
98Spector c. Zarfati, supra, nt. 42, p. 241.
99V. le juge ASHER,supra, nt. 89; V. aussi le juge BARAK dans l'arrêt Pnidar c. Castro (IE), supra, nt. 69, p. 726 et le juge SHAMGAR dans Kaplan c. Novogrozky, supra, p. 484.
100V., par ex. : l'opinion du juge SHAMGAR dans Pnidar c. Castro (DN), supra, nt. 69, p. 696.
101Pnidar c. Castro, supra nt. 69, p. 696. Dans cette affaire, l'acheteur de l'appartement a accordé confiance au gérant de la compagnie de construction. Étant donné que la compagnie faisait face à des difficultés financières, il appartenait au gérant d'aviser l'acheteur des risques que cela pourrait comporter pour son investissement.
102Supra, nt. 42, 62, 98.
103SHALEV, op. cit., 19 5, 56, nt.54.
104V., par ex., l'opinion u juge SHAMGAR dans Pnidar c. Castro (DN), supra, nt. 69, 696, de même que dans Kaplan c. Novogrozky, supra, nt. 97, 484. Au sujet des aspects économiques de la divulgation d'information v. HONDIUS, op. cit., 1991, 7.
105SHALEV, op. cit., 19 0, 48, Reports 19.
106FRIEDMANN-COHEN, op. cit., 1991, 591-593.
107L'État d'Israël c. Ingénieur Faber, Entrepreneurs, 1990, 44(iii), P.D. 769.
108Domb c. Domb, 1986, 40(iii), P.D. 792.
109Raviv c. Beit Yoles, 1983, 37(i), P.D. 533 ; v. aussi supra nt. 41.
110Beit Yoles c. Raviv, 1989, supra nt. 42.
111V. RABELLO, op. cit:, 1994, pp. 149 et s. et les références à la loi suisse et de l'Angleterre dans HONDIUS, op. cit., 18.
112Pnidar c. Castro, 1983, 37(iv), P.D. 673.
113R. SCOGNAMIGLIO, op. cit., 1968, p. 207.
114Pour le Linoleumfall cas (Reichsgericht, 7-12-1911), v. A. M. RABELLO, « The Theory Concerning Culpa in Contrahendo Precontractual Liability : From Roman Law to the German Legal System - Hundred Years after the Death of Jhering », dans European Legal Traditions and Israël, vol. 1 (ed. A. M. RABELLO), Jérusalem, 1994, pp. 69 et s.
115V. la critique de BENATTI en ce qui a trait à la fondation théorique de Linoleumfall in BENATTI, op. cit., 1963, pp. 79 et s. ; R. SCOGNAMIGLIO, « Responsabilità contrattuale ed extracontrattuale », 15 NNDI, 1967, pp. 670 et s. Selon FRIEDMANN-COHEN, puisque les cas où un dommage est causé lors des négociations sont traités tant dans le droit anglo-américain que dans le droit israélien comme des cas de responsabilité civile délictuelle, il n'y a pas lieu de se référer à l'article 12. V. FRIEDMANN-COHEN, op. cit., 1991, p. 154. D'après HONDIUS, seuls l'Allemagne, l'Autriche, la Suisse et la Turquie reconnaissent la responsabilité culpa in contrahendo. Le droit de la responsabilité civile délictuelle dans ces pays ne permet pas que soit accordé un remède à celui qui subit un préjudice. Il semble alors que dans ces cas on ait trop étendu la doctrine de culpa in contrahendo, d'où les appels à ce que des modifications soient apportées au droit de la responsabilité civile délictuelle. V. HONDIUS, op. cit., 1991, p. 20.

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