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ICC Award No. 12290, Collection of ICC Arbitral Awards 2008-2011, at Page 831 et seq.

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ICC Award No. 12290, Collection of ICC Arbitral Awards 2008-2011, at Page 831 et seq.
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832

L'analyse du tribunal arbitral

[...]

« Dans la célèbre sentence Lagergren de 1963 (affaire CCI N° 1110), l'arbitre unique a refusé de se reconnaître compétent après avoir jugé que le contrat avait une cause illicite et l'avoir déclaré nul et non avenu. Cependant, une pareille opinion ne peut plus être soutenue. En effet, le principe de l'indépendance de la clause compromissoire (en vertu duquel l'invalidité d'un contrat n'affecte pas la clause arbitrale) est largement accepté et est consacré par le droit français (Civ I, 30 septembre 1993 (1994) Rev. de l'Arb., p. 359). Ce principe a été reconnu en particulier en ce qui concerne les contrats déclarés nuls pour contrariété à l'ordre public ou aux bonnes moeurs (affaire CCI n° 6848, Annuaire, 1994, p. 124; CCI N° 3916; BOCKSTIEGEL, Public Policy and Arbitrability (Ordre Public et Arbitrabilité), ICCA Congress Séries N° 3 (1987) p. 177 et suivantes, pp. 201-202). Ce principe devrait s'appliquer à un compromis conclu à l'issue d'un litige, par exemple sous forme d'un 'Stipulated Order of Dismissal', sauf le cas où la cause de l'invalidité du contrat affecterait également le compromis. Le compromis n'est pas affecté par l'invalidité du contrat. »

[...]

« ... une majorité de la doctrine, confortée par de nombreuses sentences arbitrales, considère que l'immoralité des pratiques de corruption et de trafic d'influence est fondée sur une règle véritablement internationale, de telle sorte qu'il n'est pas douteux que celle-ci appartient à l'ordre public transnational (CCI N° 2730; CCI N° 1110; LALIVE dans Congrès ICCA série N° 3 (New York 1986),p. 293). Certains vont même jusqu'à affirmer qu'il existe un consensus général quant à l'existence d'un « droit commun à l'ensemble des nations » sur ce point (KOSHERI/LEBOULANGER, l'Arbitrage face à la corruption et au trafic d'influence, Rev. de l'Arb., 1984, p. 3,5).

833  

Enfin, la France a ratifié la Convention OCDE sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales (ci-après
« Convention OCDE » dont l'article 1 prévoit:
« Chaque Partie prend les mesures nécessaires pour que constitue une infraction pénale en vertu de sa loi le fait intentionnel, pour toute personne, d'offrir, de promettre ou d'octroyer un avantage indu pécuniaire ou autre, directement ou par des intermédiaires, à un agent public étranger, à son profit ou au profit d'un tiers, pour que cet agent agisse ou s'abstienne d'agir dans l'exécution de fonctions officielles, en vue d'obtenir ou conserver un marché ou un autre avantage indu dans le commerce international.
Chaque Partie prend les mesures nécessaires pour que constitue une infraction pénale le fait de se rendre complice d'un acte de corruption d'un agent public étranger, y compris par instigation, assistance ou autorisation. [ ... ] ».
Le 30 juin 2000, la France a transposé la Convention OCDE en adoptant la loi N° 2000-595, entrée en vigueur le 29 septembre 2000 (CHARPIER, FCPA, Convention OCDE et Nouvelle Législation des États Membres de l'OCDE, Lausanne 2004, p. 515). La France a ainsi confirmé et reconnu le caractère illicite de la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales. »
« Il résulte de ce qui précède que la corruption est illicite, tant en vertu du droit français que des règles d'ordre public international. »

[...]

« L'examen de la légalité de la cause permet au juge de s'assurer des motifs qui ont amené les parties à conclure leur convention (MALAURIE/AYNES, Les obligations, Paris 1999, p. 301). Cependant la jurisprudence estime que le juge ne prendra en compte que la cause initiale et déterminante (Civ. 1, 1 octobre 1996).
Il est dès lors nécessaire de déterminer en premier lieu la véritable intention des parties. Une telle détermination est parfaitement possible, dans la mesure où l'illégalité de la cause s'interprète généralement au moyen d'éléments subjectifs (KOSHERI/LEBOULANGER, op cit, p. 3, 9).

[...]

Dès lors, en droit français, le juge (ou l'arbitre) doit déterminer l'intention des parties en examinant les termes utilisés dans le contrat ainsi que le comportement ultérieur des parties contractantes (Civ. 3e, 5 février 1971; Civ 1re, 13 décembre 1988; 9 novembre 1993). Le juge peut se référer à la conduite précontractuelle des parties afin de rechercher leur intention (voir notamment Civ 1, 18 février 1986, Bull. civ. I, N° 31, en ce qui concerne les offres précontractuelles émanant de l'une des parties). Ceci est confirmé par la pratique arbitrale et il a notamment été jugé que « le but de l'interprétation est d'établir l'intention réelle des parties au-delà des termes utilisés dans leur convention. Au regard de ce principe, l'ensemble des circonstances, antérieures, concomitantes ou postérieures au contrat en cause, doivent être prises en compte, car elles sont liées à l'objet de l'interprétation » (CCI, N° 6848, dans Annuaire d'Arbitrage Commercial, Vol. XIX, p. 124-140, p. 127-128).

Par ailleurs, l'article 1161 du Code Civil dispose que:
« Toutes les clauses des conventions s'interprètent les unes par rapport aux autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l'acte entier. »
II ressort de cette disposition que le contrat doit être considéré dans son ensemble lors de l'interprétation de ses clauses les unes par rapport aux autres. » 


834

« [...] En vertu d'un principe général, la charge de la preuve incombe à la partie invoquant le caractère illicite du contrat (Civ. 1, 1er octobre 1986, Bulletin I N° 230, p . 220). Cependant, ce caractère illicite est souvent difficile à prouver, les parties masquant l'objet réel du contrat derrière des stipulations contractuelles anodines (MAYER, les Commissions illicites, publication CCI N° 480/2, 1992, p. 51). Les Tribunaux - ou les arbitres - peuvent, en principe, utiliser tous moyens de preuve autorisés par la loi, étant entendu qu'ils ne sont pas liés par la formulation du contrat (Civ. 2 janvier 1907, Bulletin Arrêts Cour de cass., chambre civile N° 1, p. 1). [...] »


835
[...]

« [ ... ] L'État a fait valoir avec succès que le Protocole ne pouvait être exécuté pour cause d 'illicéité et contrariété aux bonnes moeurs. En de telles circonstances, un principe général de droit français veut que ni les réclamations formées en vertu d'un tel contrat ni les demandes en restitution ou actions en enrichissement sans cause au titre des obligations déjà exécutées ne soient recevables (« in pari causa turpitudinis cessat repetitio »). En effet, le droit français prévoit que dans l'hypothèse où un contrat est jugé nul pour avoir trouvé sa cause dans la corruption et où cette cause est connue des deux parties, aucune action en répétition ne peut être admise (Paris, Cour d'appel, 30 septembre 1993, « European Gas Turbine v. Westman », Revue de l'Arbitrage, 1994 - N° 2, p. 359-370, 366). Dans le cas susvisé, la cour d'appel de Paris avait motivé sa décision par l'application de l'adage « in pari causa turpitudinis cessat repetitio ». Celui-ci veut qu'aucune demande de restitution ne soit recevable en cas d'immoralité des deux parties à un contrat. [...] »

Referring Principles
A project of CENTRAL, University of Cologne.